Undav en pleine célébration après avoir marqué contre Eupen, en octobre dernier.
Mais où s’arrêtera donc Deniz Undav ? Encore inconnu au bataillon il y a un an et demi, l’attaquant de 25 ans trône aujourd’hui seul en tête du classement des buteurs de D1A. Un avenir radieux semble s’offrir à lui dans les années à venir. Reste à savoir où. prev
Ce dimanche, les routes de deux des meilleurs attaquants de notre championnat se croiseront sur la pelouse du stade Marien à l’occasion d’Union-Genk : celles de Deniz Undav et de Paul Onuachu (le club limbourgeois espère qu’il sera retapé de sa blessure musculaire). L’attaquant saint-gillois est dans la forme de sa vie, lui qui a recommencé l’année sur les chapeaux de roue en plantant deux buts contre Seraing. Un doublé qui lui permet d’occuper seul la tête du classement des buteurs avec 18 réalisations (une de plus que Michael Frey). Et ce, quelques jours après avoir pris une belle quatrième place lors du Soulier d’Or remporté par l’avant-centre nigérian. Un résultat qui constitue une véritable prouesse car il a pris tous ses points au second tour des votes (lors du premier tour, l’Union était encore en D1B et donc aucun de ses joueurs n’était éligible).Illustre inconnu du grand public lorsqu’il débarqua à la Butte voici dix-huit mois, Deniz Undav explose tout sur son passage depuis lors. Cette saison, il en est déjà à cinq doublés et un quadruplé ! Sans oublier qu’il a aussi distribué neuf assists. C’en est à se demander où se situe son potentiel exact. Celui qui fut considéré comme trop limité par le Werder Brême durant son adolescence pourrait-il un jour faire son retour en Allemagne par la grande porte ? Ou dans un autre championnat d’envergure ? Quatre anciens joueurs offensifs belges se mouillent.1En dix-huit mois, il a mis tout le monde d’accordLorsque Deniz Undav a débarqué à l’Union durant l’été 2020 en provenance du SV Meppen en D3 allemande, les attentes qui pesaient sur ses épaules étaient grandes. Très grandes mêmes car, la saison précédente, l’USG avait cruellement manqué de réalisme sous la houlette de Thomas Christiansen. Mais les premiers pas de l’avant-centre allaient faire grincer des dents. « J’ai commenté à la télévision son tout premier match de préparation contre le Crossing de Schaerbeek », se rappelle l’ancien capitaine saint-gillois, Dany Ost. « Et j’avais été très déçu. Il n’avait pas été bon et, à ce moment-là, je ne croyais pas du tout en lui. Il faut avoir l’humilité de le reconnaître Depuis lors, il a littéralement explosé. Il est fort dos au goal, il a de la présence devant le but, il a un bon contrôle de balle, il a cette faculté à marquer très facilement. La comparaison pourrait paraître dingue mais il me fait désormais un peu penser à Gerd Müller. »L’heure de la reconnaissance pour l’attaquant turco-allemand sera donc arrivée à l’âge de 25 ans (il fêtera ses 26 ans en juillet prochain). « En fait, on ne peut pas vraiment dire qu’il explose sur le tard », analyse Nordin Jbari. « Je me dis surtout que ce n’est pas de sa faute si des clubs ne l’ont pas vu plus tôt. Et d’ailleurs, je ne comprends toujours pas qu’un club de D1A n’ait pas essayé de le prendre à l’Union en fin de saison dernière, ou même tout autre joueur de l’USG. S’il se fait connaître sur le tard, c’est également car il a dû trouver un entraîneur qui parvienne à faire ressortir le meilleur de lui. Et c’est ce qu’il s’est passé avec Mazzù. Aussi faut-il souligner sa grande force de caractère, le fait qu’il n’ait jamais abandonné. »2L’Allemagne, la France ou l’Espagne, mais pas l’AngleterreMaintenant qu’il a démontré l’étendue son potentiel, une question légitime se pose : jusqu’où est-il capable d’aller ? Mais avant toute chose, encore faut-il savoir si et quand il partira de l’Union. La direction l’a affirmé, elle ne devrait perdre aucun de ses cadres durant le mercato hivernal. Mais elle leur a fait comprendre qu’ils pourraient recevoir leur bon de sortie en fin de saison « après avoir terminé l’aventure tous ensemble ». De là à dire qu’Undav partira à coup sûr en été, il y a un pas qu’Alex Czerniatynski, ancien coach de l’USG, ne franchirait pas trop vite. « Imaginons que l’Union aille en playoffs 1 et soit championne -ce qu’elle mériterait –, elle jouerait alors la coupe d’Europe. Cela pourrait et devrait le faire réfléchir. Car il serait en outre dans une équipe où il aurait 99 % de chances de jouer chaque week-end. Ce qui ne sera pas spécialement le cas dans un autre club. Imaginons de plus qu’il reste et qu’il gagne le Soulier d’Or l’an prochain. Encore plus de portes s’ouvriraient à lui. Pour moi, c’est vraiment le résultat final de l’Union cette saison qui fera pencher la balance. »Et s’il venait tout de même à partir d’ici quelques mois, quelle compétition lui conviendrait le mieux ? « Pour moi, il n’a pas le style de l’Angleterre qui est un championnat avec beaucoup d’impact et peu d’espace », analyse Dante Brogno, qui a également été coach de l’Union. « Il aurait plus sa place dans des pays où on laisse plus jouer jusqu’à une certaine distance du but, comme l’Allemagne, la France ou l’Espagne par exemple. »« J’aimerais beaucoup le voir dans le championnat allemand », lâche pour sa part Dany Ost. « Mais pas au Bayern de Munich », coupe Nordin Jbari. « Je le vois plutôt dans un bon club comme Leipzig, un club dans lequel il pourrait jouer et augmenter son niveau de jeu. Car pour jouer au Bayern, il faut vraiment être un très grand attaquant. Après, on ne sait jamais ce qu’il peut arriver. Regardez Dante qui jouait à Charleroi. Qui se serait douté à ce moment-là qu’il allait ensuite faire un tel bout de chemin du côté de Munich ? Je pense en tout cas qu’il peut faire une très belle carrière dans un club du subtop allemand. »Mais il ne s’agit pas là de la seule marche qu’il a encore à franchir. En effet, il lui reste également celle de l’équipe nationale. « Il mériterait une sélection. Avec la Turquie ? Pourquoi pas », sourit Dany Ost.3Un atout pour éviter les embûches : sa force mentalePour parvenir à sauter le pas avec réussite vers des cieux plus lointains, Deniz Undav devra certainement éviter quelques embûches. Dont la principale : gérer la pression inhérente qui pèse -peut-être encore un peu plus que sur les autres joueurs- sur les épaules d’un avant-centre. « Quand on attire un attaquant qui vient de marquer 20 ou 25 buts, les attentes sont grandes », explique Alex Czerniatynski. « On attend de lui qu’il marque directement. C’était le cas pour moi aussi. Personnellement, j’ai toujours eu la chance de scorer dès mes premiers matches. Lui laissera-t-on le temps ? J’ai connu beaucoup de bons attaquants partis à l’étranger qui sont revenus peu après en Belgique car cela n’avait pas marché. Mais je pense vraiment qu’il a les qualités pour s’imposer ailleurs. »Une vision que partage Dany Ost. « Pour moi, il peut aller plus haut. Il aura toutefois besoin à ses côtés d’un joueur avec qui il a une belle complémentarité. C’est le cas actuellement avec Vanzeir. Mais comment cela se passera-t-il sans lui ? »Et pour Dante Brogno, le buteur possède un atout non négligeable : une grande force mentale. « Comme lui, j’ai également travaillé avant ma carrière (NDLR : Undav travaillait à l’usine lorsqu’il ne gagnait pas encore sa vie en tant que footballeur). Je bossais comme mécanicien automobile. C’était ma passion à la base. Mais quand tu te rends compte que tu dois travailler dans le froid, avec les mains dans le cambouis et dans la graisse toute la journée, et que tu goûtes au milieu du foot, tu te dis que la vie de sportif de haut niveau est celle rêvée. Je pense que les joueurs qui ont travaillé et qui savent d’où ils viennent savourent d’autant plus la chance qu’ils ont de vivre du foot. »Ce qui semble pleinement être le cas d’Undav qui voudra très certainement à nouveau faire parler la poudre ce dimanche pour sa première de l’année au stade Marien.