Le soleil tape sur le
centre d’entraîne-
ment de l’Union, à
Lier, quand Dante
Vanzeir nous attend en com-
pagnie de sa sœur, Luna. Le
buteur et la joueuse d’OHL en-
chaînent trois longues inter-
views, sans jamais sourciller,
pendant que les autres
joueurs unionistes rentrent
tour à tour chez eux.
Il faut dire que les deux
membres de la famille Van-
zeir ont vécu un week-end de
folie il y a maintenant deux
semaines : après un triplé de
Luna (18 ans) avec OHL, son
grand frère (23 ans) s’est lui
aussi offert trois buts, face au
Standard. “Nous avons reçu
énormément de messages”, ri-
gole Luna. “C’était un week-end
spécial et magique pour nous
deux, continue Dante. Nous
avons tous les deux ramené le
ballon du match à la maison
(sourire). Ce ne sont pas des
moments que nous allons rapi-
dement oublier…”
Avec une vraie complicité,
Luna et Dante Vanzeir sont
revenus sur leur par-
cours respectif qui les
a menés au sommet
du football belge.
Avant de peut-être vi-
ser encore plus haut.
Comment se sont déroulés vos
débuts dans le football ?
Dante Vanzeir : “J’ai com-
mencé plus tôt que Luna vu que
j’ai cinq ans de plus qu’elle. J’ai
fait mes débuts dans le petit
club de Berkenbos puis je suis
directement passé à Genk à
l’âge de 6 ans. Ma sœur était
toujours dans les parages et
voulait souvent jouer avec moi.”
Luna Vanzeir : “J’allais souvent
voir jouer Dante et je le voyais
aussi jouer dans notre jardin.
C’est cela qui m’a poussé à faire
du football.”
D.V. : “Notre père a aussi joué
un rôle car il a évolué jusqu’en
quatrième division. Il a été
champion à plusieurs reprises
avec des clubs comme Wellen,
Neeroeteren ou encore Ber-
kenbos. Il a même eu la
possibilité de signer en
deuxième division
mais ma mère
était enceinte
de moi à ce mo-
ment et mon
père a préféré
rester près
d’elle.”
Luna, vous avez
toujours joué
avec des gar-
çons en catégo-
ries d’âge.
Comment gère-
t-on cela durant
son adolescence ?
L.V. : “Ce n’était pas
toujours simple
car ils étaient
plus grands et
plus costauds que moi. Avec
l’âge, ils devenaient de plus en
plus solides physiquement. Il y
avait des équipes pour filles
mais je préférais jouer avec les
garçons car je savais que cela
allait me rendre meilleure.”
Vous avez toujours joué au sein
de clubs provinciaux avant
OHL ?
L.V. : “Oui, même si j’ai quand
même eu la
possibilité de faire des entraîne-
ments à l’âge de 9 ou 10 ans à
Genk.”
D.V. : “Il y avait une détection
de talents et Luna s’est inscrite.
Elle était la seule fille. Après les
entraînements, ils ont sélec-
tionné certaines personnes
mais ils ont décidé de ne
pas prendre de filles
dans l’équipe
de gar-
çons…”
L.V. : “J’ai fi-
nalement joué
un match face à
Anderlecht et j’ai
participé à un
tournoi. C’était
la seule fois où
j’ai goûté au plus
haut niveau chez
les jeunes. Même si je compre-
nais leur décision, cela a été un
peu frustrant car j’aurais pu re-
joindre un grand club, qui était
en plus celui de mon frère.”
Sur le terrain, qui est le plus
technique ?
D.V. : “C’est facile, c’est elle
(sourire). Elle a des qualités
footballistiques balle au pied
très développées. La vista, la
technique, le passing, le con-
trôle… Vu qu’elle jouait contre
des garçons, elle devait utiliser
sa technique pour se faire une
place. De mon côté, je suis
meilleur sans ballon quand il
s’agit de trouver les espaces
dans le dos de la défense ou de
faire des courses vers le but. La
technique n’est pas inscrite
dans mes gènes, au contraire
de Luna. Je suis un peu son op-
posé mais si on mixe nos deux
profils, on doit peut-être avoir
le meilleur joueur du monde
(sourire).”
Quel est le défaut de votre
sœur sur le terrain ?
D.V. : “Luna est très dure
envers elle-même ; elle est
très perfectionniste. Par
exemple, elle ne sera pas
contente si elle a loupé une
action durant un match.”
L.V. : “Ou même si je ne mar-
que tout simplement pas de
buts (sourire).”
D.V. : “Ce n’est pas nécessai-
rement un point faible mais il
faut savoir gérer ce paramètre.
Une action ratée ne doit pas
trotter trop longtemps dans la
tête d’un attaquant car cela
peut être handicapant pendant
un match.”
Luna, peut-on dire que Dante
est un modèle pour vous ?
L.V. : “Oui, vraiment, je
m’inspire souvent de lui et
de sa vitesse, de son explo-
sivité ou encore de son
efficacité devant le but.
S’il n’est sûrement pas
le joueur le plus
technique, il est très rapide et a
toujours en tête l’idée de mar-
quer. À un autre niveau, j’adore
aussi Kevin de Bruyne : sa vista,
sa précision, son passing et sa
technique font de lui l’un des
meilleurs du monde.”
D.V. : “Moi, je n’ai jamais eu
d’idole mais j’aime bien Sergio
Agüero. Quand il jouait à
Manchester City, il a prouvé
qu’il ne fallait pas être l’atta-
quant stéréotype, grand et cos-
taud, pour réussir dans un des
meilleurs clubs du monde. Si
tu es petit mais intelligent, tu
peux aussi faire une grande
carrière.”
Lequel de vous deux gère le
mieux l’aspect mental ?
L.V. : “Dante !”
D.V. : “C’est normal car Luna
n’a que 18 ans alors que j’ai
déjà accumulé pas mal d’expé-
rience ces dernières années. Je
sais mieux comment gérer une
blessure ou un mauvais match.
À Malines par exemple, je n’ai
pas nécessairement beaucoup
joué mais j’ai énormément ap-
pris là-bas.”
Êtes-vous critique l’un envers
l’autre ?
D.V. : “Parfois, après un
match, on se parle : ‘Pourquoi
tu as fait tel geste à ce mo-
ment-là ? Pourquoi tu n’as pas
essayé de marquer à ce mo-
ment-là ?’ Mais ce n’est pas
pour critiquer. On laisse notre
père s’occuper des critiques
envers nous (sourire). De no-
tre côté, on essaye plutôt de
trouver le soutien chez l’autre
qui sait ce qu’on ressent vu
qu’on joue à la même posi-
tion.”
Êtes-vous stressée pour votre
frère durant les rencontres ?
L.V. : “Je suis stressée pour
Dante surtout quand il s’agit
d’un match important. Comme
face au Standard, mais il s’en
est finalement plutôt bien sorti
(sourire). Je ressens aussi par-
fois un petit stress pour son ge-
nou (NdlR : elle touche le ge-
nou de son frère qui s’est dé-
chiré les ligaments croisés en
2016). J’espère toujours qu’il ne
va pas se blesser.”
Quelles sont vos ambitions
personnelles pour la suite de
votre carrière ?
L.V. : “J’espère avoir la
chance de pouvoir jouer à
l’étranger, peu importe
l’équipe, même si le champion-
nat français avec des équipes
comme le PSG ou Lyon m’attire.
Cela me permettrait d’arriver à
vivre du football, ce qui est
presque impossible en Belgi-
que. Il y a parfois une certaine
frustration de voir la différence
avec le foot masculin mais cela
évolue positivement.”
D.V. : “Je pense qu’il est
temps d’investir plus d’argent
dans le foot féminin. Dans
d’autres pays comme aux Pays-
Bas ou en Angleterre, le foot fé-
minin est plus évolué. Cela doit
servir d’exemple pour la Belgi-
que.”
Dante, pensez-vous aux Dia-
bles rouges ? Avant le rassem-
blement de l’équipe nationale,
Roberto Martinez a parlé positi-
vement de vous…
D.V. : “J’étais surpris d’enten-
dre Martinez parler de moi. Si
on m’avait dit cela il y a un
mois, je n’y aurais jamais cru
(sourire). Même si je ne suis
encore arrivé nulle part, cela
récompense le travail et toutes
les heures investies dans le
football. Les Diables, on en rêve
en étant petit. Chaque année, si
j’arrive à progresser, je me rap-
procherai toujours un peu plus
de mon rêve… Sur ce point-là,
Luna m’a devancé car elle a
déjà joué un match amical
avec les Red Flames donc elle a
fait ses débuts avant moi (ri-
res).”
L.V. : “J’espère pouvoir faire
partie intégrante du groupe
des Red Flames rapidement.
Pour le moment, j’évolue avec
l’équipe U23. Cela me permet
de me confronter à des équi-
pes comme l’Angleterre, les
Pays-Bas ou l’Allemagne. Cha-
que match me permet d’ap-
prendre quelque chose et de
me rapprocher de l’équipe na-
tionale.”