Le club bruxellois est à la mode
de l’autre côté de la frontière linguistique.
La plus grande menace
pour Anderlecht n’est ni
Bruges, ni Genk ni le
Standard. La plus
grande menace pour les Mauves
est l’Union” : ces mots sont ceux
de Jan Mulder, analyste foot en
Flandre, à Playsports en…
avril 2019. À l’époque, alors
que les Jaune et Bleu viennent
de louper la promotion en
D1A, la Flandre prend l’ancien
joueur néerlandais pour un
fou. L’Union, ce “petit” club
qui végète dans les divisions
inférieures depuis plus de
40 ans, une menace pour le
grand Anderlecht ?
Moins de trois saisons plus
tard, la façon de voir l’Union a
changé en Flandre. Promu en
début de saison, le club attire
les regards grâce à ses récents
résultats jusqu’à être devenu
un club à la mode en Flandre.
“Il y a une vraie hype autour
de l’Union en Flandre, analyse
Bart Lagae, chef sport au quoti-
dien De Standaard. C’est devenu
le deuxième club de cœur de
beaucoup de gens. Ma voisine,
qui habite à Louvain, regarde
deux matchs par week-end : celui
d’OHL et celui de l’Union. Les Fla-
mands veulent bien sûr que leur
club soit champion mais si ce
n’est pas le cas, ils préfèrent que
ce soit l’Union. Beaucoup de gens
autour de moi, dont de nom-
breux Hollandais, se rendent au
stade Marien pour connaître
l’ambiance si particulière qui y
règne.”
L’intérêt grandit et la cou-
verture médiatique dans les
journaux néerlandophones
est donc plus large. Le Stan-
daard a d’ailleurs décidé d’en-
voyer un journaliste à chaque
rencontre de l’Union depuis le
début de la saison. “La saison
dernière, il n’y avait quasiment
pas une ligne sur le club dans
nos journaux, explique Bart La-
gae. Depuis la promotion en D1A,
cela a complètement changé.
Cela a commencé avec des arti-
cles sur le retour au premier plan
d’un club de tradition. Avec les
résultats actuels de l’équipe, la
médiatisation est encore plus
grande. L’Union est finalement
devenue plus importante que
Genk, sauf dans le Limbourg. Un
supporter de Bruges, de l’An-
twerp ou de Malines va être plus
intéressé par l’actualité unio-
niste que limbourgeoise. Si
l’Union n’était pas en tête, il n’y
aurait eu que deux journalistes
dimanche contre Genk mais
nous en avons finalement en-
voyé un troisième.”
Cet intérêt se ressent au sein
du club unioniste. Depuis de
nombreuses semaines, les de-
mandes affluent, aussi bien du
côté francophone que du côté
néerlandophone.
“Il y a encore des gens au nord
du pays qui découvrent notre
équipe alors qu’elle était déjà
plus connue au sud, avance
Maarten Verdoodt, responsa-
ble communication de
l’Union. L’histoire du club qui re-
vient au sommet plaît. Il y a trois
ou quatre ans, on savait que si
l’Union faisait son retour en D1A,
le public flamand répondrait pré-
sent. Et cela se voit aussi dans
nos gradins. Plus ou moins 700
abonnés sur les 5 500 ont une
adresse en Flandre, sans compter
les nombreux Bruxellois néerlan-
dophones. Il y a un énorme en-
gouement des jeunes Flamands
qui déménagent vers Bruxelles.
En comparaison avec la saison
dernière, nous avons beaucoup
plus de jeunes qui parlent néer-
landais dans nos tribunes.”
Pourtant, l’objectif initial du
club n’est pas d’aller convain-
cre des habitants de Flandre de
venir supporter l’Union. La ci-
ble est plutôt axée sur les
Bruxellois.
“Le plus important est de créer
du lien au sein de la ville, com-
mente Maarten Verdoodt. Des
clubs comme Anderlecht, Bruges
ou Genk recrutent beaucoup de
fans à travers toute la Flandre.
Ce n’est pas notre cas, nous
n’avons pas cet objectif d’aller
chercher du soutien en dehors de
la ville. Mais cela n’empêche que
certains viennent de la Flandre
profonde pour soutenir notre
équipe. Un club de supporters va
par exemple se créer dans le Lim-
bourg. Nous ne cherchons pas à
recruter activement les Flamands
mais eux sont attirés par le club.”
Qu’est-ce qui rend ce club
aussi attractif dans le nord du
pays ? Pour beaucoup, l’am-
biance qui colle à la peau de
l’Union n’existe nulle part
ailleurs et les bons résultats ne
font qu’amplifier le phéno-
mène.
“En Flandre, de plus en plus de
gens connaissent la réputation
des supporters unionistes et
l’ambiance qui existe dans le
stade, soulève le journaliste
Bart Lagae. Aller à l’Union est
une expérience différente, ce
n’est pas comme se rendre dans
les nouveaux stades où tout est
bien organisé. Il y a cette idée de
football authentique qui plaît
beaucoup. Et puis, c’est une
équipe sans véritables ennemis
en Flandre. Aucun supporter
d’un club flamand ne déteste
l’Union surtout si elle bat des ri-
vaux (sourire).”
Pour répondre à la de-
mande, la cellule communica-
tion du club s’est quelque peu
adaptée à l’heure de publier
des contenus sur ses réseaux
sociaux. Depuis le début de la
saison, les posts sont écrits
avec une partie en français et
l’autre en néerlandais pour
mieux coller à la cible. “On fait
cela car on sent qu’il y a un inté-
rêt des néerlandophones sur nos
réseaux sociaux, avance le res-
ponsable communication du
club. Il y a un gros engagement
avec énormément de réactions,
ce qui nous permet de faire par-
tie des meilleurs clubs de Belgi-
que. Il y a aussi un intérêt venu
des Pays-Bas grâce à la présence
dans l’équipe de Bart
Nieuwkoop. Des supporters réa-
gissent sur les réseaux sociaux et
les plus grands journaux du pays
nous posent des questions.”
“Une vraie rivale
de Bruges”
Leekens et Borkelmans, anciens Brugeois,
voient les Bruxellois se battre pour le titre.
P endant que les suppor-
ters flamands s’intéres-
sent au phénomène Union, les
adversaires des Bruxellois
rient jaune. L’équipe de Mazzù
est devenue une menace pour
toutes les formations de Pro
League, à commencer par le
Club Bruges.
“L’Union est une vraie rivale
de Bruges, avance Georges Lee-
kens, ancien entraîneur des
Brugeois. Mais c’est aussi une
rivale d’Anderlecht et de l’An-
twerp. Tout le monde respecte ce
club qui n’est pas en tête par ha-
sard. Tout le monde est amou-
reux de l’Union et personne n’est
jaloux… jusqu’à maintenant.
Car durant les playoffs, cela
pourrait changer !”
Pour Vital Borkelmans,
joueur du Club de 1989 à
2000, la pression sera sur les
épaules brugeoises ce jeudi
soir.
“La vitesse des avants de
l’Union peut faire mal d’autant
que Bruges n’est pas au point dé-
fensivement, analyse l’ancien
sélectionneur de la Jordanie.
Les Bruxellois ont une équipe
très complémentaire, bien orga-
nisée et qui peut marquer via au
moins quatre joueurs dange-
reux. Si le Club veut être cham-
pion, il doit gagner, c’est certain.
Mais quand on voit la fraîcheur
et l’esprit d’équipe à l’Union,
pourquoi ne pourrait-elle pas
être championne ? Tout le monde
en Flandre est en tout cas im-
pressionné par l’Union car on as-
siste à un conte de fées.”
Avec à la tête de l’équipe un
personnage qui fait l’unani-
mité : Felice Mazzù. “Il faisait
partie de ma short-list comme T2
chez les Diables en cas de départ
de Wilmots vers le Standard,
avance Leekens. C’est un entraî-
neur de haut niveau, correct
avec tout le monde et qui a re-
trouvé la joie après son passage
à Genk.”
“On sent que sa connexion
avec le groupe est très forte, con-
clut Borkelmans. C’est un très
bon entraîneur qui arrive à
transmettre toute la confiance
qu’il faut à ses joueurs. Ce qu’ils
font est phénoménal et Bruges
doit faire attention…”
“Un énorme défi
de maturité”
Les Unionistes se déplacent en Venise
du Nord sans trop de pression.
T out sourit à l’Union.
Depuis le début de la
saison, les astres s’alignent
permettant au club
bruxellois de surprendre
son monde semaine après
semaine. Dimanche, c’est
au bout du suspense, à la
100e
minute, que Dante
Vanzeir a offert les trois
points à son équipe.
“J’entends beaucoup de
gens dire que tout tourne
pour l’Union et que l’équipe
a de la chance, avance Fe-
lice Mazzù, l’entraîneur
des Unionistes. Mais il y a
aussi de la qualité et une
grosse envie d’aller au bout
des choses sans jamais rien
lâcher. Dans toute réussite, il
faut de la qualité, de l’envie,
de l’ambition et parfois un
peu de chance. En tout cas,
le groupe croit chaque se-
maine qu’il peut gagner le
prochain match.”
Et la prochaine rencon-
tre qui attend l’Union n’est
pas n’importe laquelle
puisqu’il s’agit du choc de
cette Pro League entre le
leader et le champion en
titre. En cas de victoire au
Club Bruges, les Bruxellois
pourraient mettre leur ad-
versaire à douze unités…
“Avoir neuf points
d’avance est énorme quand
on sait que nous venons de
D1B et que notre objectif ini-
tial était le maintien, com-
mente Felice Mazzù. Cette
rencontre sera un énorme
défi dans la maturité, dans
l’ambition, dans le désir de
créer quelque chose. Les Bru-
geois ont déclaré qu’ils vou-
laient prouver qu’ils étaient
les meilleurs. En termes d’in-
frastructures, de moyens ou
encore d’un point de vue
qualitatif et quantitatif, je
peux déjà le dire : Oui, ce
sont les meilleurs. Bruges
reste sur deux titres de
champion de rang et a je ne
sais combien de joueurs à
plusieurs millions d’euros
sur le terrain. De notre côté,
nous allons tout faire pour
réaliser un bon match chez
les meilleurs. Nous voulons
continuer notre histoire.”
. Nouveau système
de jeu
Les Unionistes vont de-
voir faire face à une équipe
différente du match aller.
Avec leur nouvel entraî-
neur, Alfred Schreuder, les
Brugeois ont mis en place
un nouveau plan de jeu
qui a permis de battre
Saint-Trond mais sans arri-
ver à se défaire du Stan-
dard. “Dans leur nouveau
système, il y a un énorme
pressing effectué dans qua-
siment toutes les zones.
Même s’ils n’ont pas deux at-
taquants spécifiques, ils évo-
luent dans un 3-5-2 qui est
différent du passé. Ils ont un
jeu vers l’avant et le reposi
tionnement de Vormer
comme numéro 6 change la
donne.”
“L’Union est prise au sérieux
et c’est ce qui nous importe”
L’ Union n’en finit plus
de surprendre. Lea-
ders avec neuf
points d’avance sur
l’Antwerp et le Club Bruges,
les hommes de Mazzù sont
sur leur petit nuage. À com-
mencer par Anthony Mo-
ris, en tête du classe-
ment des clean-sheets
qui évolue derrière
la meilleure défense
du Royaume. Le gar-
dien de 31 ans a évo-
qué sur Eleven diffé-
rents sujets chauds,
de la forme de son
équipe à celle de Deniz
Undav…
. La saison extraordinaire
“On ne peut pas parler de mi-
racle mais bien de travail.
L’Union est un club stable, sain
et avec une ligne de conduite
claire. De la direction au staff
en passant par les
joueurs, les bonnes
personnes sont
aux bons en-
droits. Les par-
cours atypiques
des joueurs
font qu’il se
passe quelque
chose. Nous
étions tous un
peu perdus
mais l’Union nous a fait con-
fiance. Nous sommes une bande
de copains qui tirons tous dans
le même sens. Le coach est der-
rière nous constamment pour
nous pousser à donner le
meilleur de nous-mêmes à l’en-
traînement. Nous avons appris
à détester la défaite et cela n’est
pas venu du jour au lendemain.
Le fait de ne pas avoir essuyé
deux défaites de rang depuis le
début de la saison dernière
prouve que cette équipe a de
grandes ressources morales.
Nous sommes dans la conti-
nuité du travail réalisé la saison
dernière. Qu’on parle de petit ou
de grand club, c’est anecdoti-
que. Aujourd’hui, l’Union est
prise au sérieux et c’est ce qui
nous importe.”
. Le mercato
“Il y a eu cette histoire de
pacte dans les journaux mais ce
n’est absolument pas cela. La
direction a simplement dit
qu’elle ne voulait pas don-
ner un bon de sortie à un
joueur plus qu’à un
autre. Pour qu’il n’y ait
pas d’histoire, nous al-
lons jusqu’au terme de
la saison avec les mê-
mes joueurs. Tout le
monde dans le
groupe l’a compris
car nous vivons
quelque chose d’uni-
que. On sait où on
veut aller et on
donne tout pour
le faire. Concer-
nant les arri-
vées, quand on
a le luxe d’ac-
cueillir un
joueur qui
coûte 10 mil-
lions d’euros
(NdlR : Kacper Ko-
zlowski), on peut dire qu’on
est plus forts qu’avant. Les
joueurs en place acceptent
la concurrence et les nou-
veaux ont rapidement
compris comment le
groupe fonctionne de
l’intérieur.”
. Le Club Bruges
“C’est une
équipe de vain-
queurs qui mar-
che sur la Pro
League depuis
plusieurs sai-
sons. Ils ont le
noyau le plus consistant et sont
donnés champions avant même
que la saison ne commence. Ils
ont un statut à gérer, c’est
l’équipe à battre. Bruges a un
nouvel entraîneur avec une
nouvelle philosophie de jeu
mise en place. J’ai hâte de jouer
cette rencontre car c’est dans ce
genre de match qu’on apprend
le plus. Nous pourrons aussi
voir où nous en sommes face
aux grosses écuries. La série de
gros matchs nous donne un
avant-goût de possibles PO1. Il
faut de toute façon jouer ces
gros matchs que ce soit avec un
intervalle long ou réduit. Il
s’agit de semaines intéressantes
qui ressemblent à des semaines
de Coupe d’Europe. Nous ver-
rons comment l’équipe réagit et
comment nos corps résistent à
l’enchaînement. Nous allons at-
taquer chaque rencontre avec
nos principes et nos valeurs et
sans appréhension comme de-
puis le début de la saison.”
. Deniz Undav
“C’est un attaquant imprévisi-
ble qui sait tout faire avec le
ballon. À l’entraînement, tu t’at-
tends à ce qu’il fasse un mouve-
ment que 99 % des attaquants
auraient fait mais il va faire
autre chose… Sa plus grande
force est sa tranquillité balle au
pied. Il est très à l’aise techni-
quement et a le bon coup d’œil
pour placer le ballon sans lais-
ser de chances au gardien.
Quand j’évoluais en D1B avec
Virton, on m’avait parlé d’Un-
dav comme cible du club. À
l’Union, il était arrivé avec quel-
ques kilos en trop et avait été
fort moqué. Les joueurs et les
staffs adverses se disaient qu’il
était impossible qu’un gars
comme lui joue en D1A. Il a mon-
tré qu’avec du travail et de la
qualité, on peut y arriver. Il a
toutes les qualités requises pour
passer un palier. Je suis très heu-
reux et très fier de ce qui lui ar-
rive car sa réussite est celle de
l’Union.”
“Les Bruxellois forment
une vraie équipe”
Alfred Schreuder
s’est montré élogieux
envers le leader
du championnat.
O pposition de style pour ce
match au sommet, tant attendu.
Et la pression est dans le camp des
Brugeois, obligés de l’emporter pour
recoller aux Bruxellois.
“Nous jouons à domicile, nous voulons
être dominants, déclare Alfred Schreu-
der, le T1 local. Mais les Unionistes
aiment laisser le ballon à leur adver-
saire, ils sont très bons dans cette situa-
tion. C’est pour moi la meilleure forma-
tion, ils forment une vraie équipe. C’est
un compliment adressé à leur entraîneur
et leurs joueurs.”
Le scénario semble écrit d’avance.
Les Blauw en Zwart vont faire tourner
le ballon pour trouver la brèche dans
la défense visiteuse. Mais en cas de
perte de balle, les flèches bruxelloises
profiteront des espaces pour faire
mal.
“Nous ne comptons pas changer notre
style de jeu. Nous devrons cependant
être plus performants défensivement. On
sait que leurs attaquants prennent bien
la profondeur.”
Histoire d’ajouter encore de la diffi-
culté, Jack Hendry sera bien suspendu
ce jeudi soir. Il a écopé de deux
matchs, dont un avec sursis, pour son
exclusion au Standard. C’était l’élé-
ment le plus efficace au niveau de la
couverture, avec une bonne pointe de
vitesse en plus. Sans doute le défen-
seur le plus solide depuis le début de
l’exercice. Mata, tout aussi bon dans le
marquage individuel, pourrait inté-
grer l’arrière-garde ce jeudi.
“Il a déjà évolué à cette position par le
passé et possède en plus de la vitesse.
C’est une bonne arme pour contrôler les
attaquants adverses. Nous avons tra-
vaillé plusieurs options”, a toutefois
nuancé le technicien néerlandais.
Ce sera probablement à Ignace Van
der Brempt d’occuper seul le flanc
droit. Il vient en tout cas de voir un
concurrent plier bagage. Tibo Persyn,
arrivé en prêt de l’Inter Milan avec op-
tion d’achat, a en effet été prêté ce
mercredi à Westerlo, en D1B. Et Bucha-
nan, lui, a rejoint sa sélection.
Alors que tous les observateurs
auront les yeux rivés sur la rencontre
et le résultat avec cette question :
est-ce que l’Union peut vraiment le
faire ? Alfred Schreuder, lui, n’est pas
obnubilé… par le résultat. “Je ne re-
garde pas trop le résultat mais bien no-
tre façon de jouer. Si nous proposons de
bonnes choses, le résultat suivra auto-
matiquement.”
Et ce, alors qu’il affronte le leader.
“Pour le moment, l’Union est la princi-
pale prétendante au titre. Quand on voit
ce qu’ils ont montré ces derniers mois,
c’est une équipe formidable.”