Les Saint-Gillois ont foulé la mythique pelouse d’Anfield ce mercredi soir.Photo News
Face à l’un des grandissimes favoris pour la victoire finale en Europa League qui risque de se priver de quelques-unes de ses stars, l’équipe bruxelloise alignera ce qu’elle a de meilleur. next
Voir Anfield et concevoir que l’on puisse ensuite mourir en paix. À peu de chose près, c’est le sentiment qui animera probablement les joueurs de l’Union Saint-Gilloise et leurs 2.700 supporters qui découvriront l’ambiance si particulière d’une des enceintes dont on ressort rarement indemne sur le plan émotionnel.
D’autant que chez les Reds, tout est solidement arrimé au sommet de la Premier League et du football européen, depuis le 1 er juillet 2015, date officielle de l’arrivée de Jurgen Klopp à la barre. L’empreinte de l’ancien entraîneur de Dortmund, l’un des premiers à avoir symbolisé le fameux gegenpressing de l’école allemande, est profondément marquée dans le sol d’Anfield. Détail croustillant, à l’heure de la poignée de mains avec son homologue de l’Union Saint-Gilloise, c’est dans la langue de Goethe que l’échange de politesses s’effectuera. Et peut-être que ça ira bien au-delà des banalités d’usage puisqu’ils ont failli se retrouver dans le même club au milieu des années 2000, Klopp ayant tenté d’attirer Blessin, encore joueur, à Mayence lorsqu’il en était à ses débuts d’entraîneur. « À l’époque de sa reconversion, il m’avait contacté, c’est exact », explique l’entraîneur saint-gillois. « On avait conversé ensemble et on s’était promis de demeurer en contact. Mais je n’ai plus jamais rien entendu de sa part. Vous savez comment va le foot », sourit-il. « J’ai ensuite pu admirer son parcours mais pour le reste, ça s’est arrêté là. J’estime que chaque coach doit garder son authenticité. Pas question de vous parler de modèle ou d’autre chose. »
Ce jeudi soir, dans la ville qui a enfanté les Beatles, à l’ombre de la statue de Bill Shankly, manager mythique du club entre 1959 et 1976, Alexander Blessin aura l’occasion de savourer chaque seconde d’un moment unique dans la vie d’un entraîneur : « J’étais déjà venu à Anfield il y a cinq ans lorsque j’avais en charge les U19 de Leipzig. Je n’en croyais déjà pas mes yeux à l’époque. Cette fois, ce sera dans un stade plein et j’officierai comme T1 d’une équipe pro. Ça risque d’être autre chose. »
« Rien à perdre »
C’est peu de le dire, en effet. Depuis une cinquantaine d’années, d’autres que lui ont plus ou moins vécu leur descente de bus et leur sortie des entrailles de cette imposante Main Stand, la tribune principale de 12.277 places qui barre l’horizon de tous les espoirs des adversaires de Liverpool. Bruges y a mené 0-2 en finale de la Coupe de l’UEFA avant de mesurer à ses dépens toute la puissance d’Anfield et de se manger trois buts en seconde période. En 2005, en phase de groupes de la Ligue des champions, Anderlecht n’est jamais parvenu à sortir du dressing room : son match (3-0) était fini avant de commencer. Seul le Standard (1-0 après prolongation) est sorti sous les bravos en barrages de cette même Ligue des champions en 2008. Là où Genk, battu 2-1 en 2019 s’en est lui aussi sorti avec tous les honneurs.
L’Union sera donc le 5 e club belge sur la liste. Mais pas forcément avec un destin identique à ses quatre prédécesseurs. Du moins se l’est-elle promise. « On devra évoluer avec notre courage et espérer deux choses », prévient Blessin, « que l’Union soit au sommet et que Liverpool soit dans un mauvais jour. Le risque d’afficher trop de respect pour l’adversaire existe bel et bien, il faut le reconnaître. Mais on ne vient pas ici pour boire le café. On n’a rien à perdre et les grandes performances commencent souvent sur ce critère-là. On devra laisser de côté notre quotidien du championnat et se focaliser sur le moment à vivre. Challenger un adversaire du calibre de Liverpool, ce n’est pas rien. Mais rien n’est impossible. On a des qualités et j’espère qu’on les montrera. »
À LIVERPOOL, FR.L.
Photo Newsprev
Le CEO de l’Union est comme toute la délégation de son club
: il s’apprête à découvrir la magie d’Anfield.
Philippe Bormans, l’Union va vivre un moment qui comptera dans son histoire.
Je ne sais pas si l’on peut vraiment parler d’un moment historique mais ce sera en tout cas un match très spécial pour le club et les 2.700 supporters qui auront fait le voyage.
Sur le plan de la gestion psychologique de l’événement, nous serons tous traversés par des sentiments très forts. Il n’y a pas un footballeur au monde qui ne rêverait pas de vivre une rencontre comme nos joueurs vont la vivre. Mais dans la matérialité des faits, il n’y a jamais que trois points en jeu. Même un exploit ne nous rapporterait pas davantage, si ce n’est un coup de boost au niveau mental pour la suite de notre saison.
Si on vous avait dit ça il y a trois ans…
Ah oui, je n’y aurais pas cru
! Et j’en aurais certainement ri. À l’époque, on venait à peine d’être champion de D1B. Alors vous vous imaginez si on m‘avait parlé de Liverpool en phase de groupes d’Europa League.
L’an passé, sous Karel Geraerts, l’Union avait entamé la quasi totalité de ses confrontations européennes pour les gagner. Liverpool, ça risque d’être une autre paire de manches…
La seule exception avait sans doute été le match de barrage de Ligue des champions à Glasgow, face aux Rangers. Mais ce match s’était déroulé dans un contexte où il nous fallait protéger un résultat. Et ce ne fut pas une réussite…
Mais pour le reste, c’est vrai, l’Union n’a pas l’habitude de jouer ses matches en touriste. On s‘apprête à disputer un véritable combat. On verra évidemment sur quoi cela va déboucher, mais on l’abordera en tout cas avec la mentalité qu’il faut. Je n’imagine pas que les joueurs soient spectateurs de leur prestation. Il y a une différence de budget dix fois supérieure entre les deux clubs et donc une différence de talent. Mais le côté insaisissable de la logique fait la beauté du foot.
Ils se sont appelés avant de se croiser sur le terrain ce soir.D.R.prevnext
Si le déplacement de l’Union à Liverpool marquera un moment important dans l’histoire du club saint-gillois, ce sera un match particulier pour deux acteurs
: le Red Alexis Mac Allister et son frère, le Jaune et Bleu Kevin. Les deux hommes ont partagé un appel vidéo plein de bonne humeur avant de se retrouver sur le terrain. «
Tu es en vacances, tu n’as pas entraînement
?
», lance Alexis à Kevin dans une vidéo partagée par les deux clubs. «
On est très détendus, on a un match facile à venir
», lui répond l’Unioniste. «
Pour moi, jouer à Anfield, entendre le «
You’ll Never Walk Alone
», ce sera incroyable
», poursuit-il. «
J’espère que tu n’apprécieras pas. Je veux que tu souffres
», répond le Red avec humour. «
Je peux te le dire parce que j’ai joué à Anfield en tant que joueur de Liverpool, mais aussi en tant qu’adversaire et je te garantis que tu vas sentir le public.
» «
Et peut-être que tu sentiras mon tacle
!
», réplique Kevin.
«
Je sais que tu nous souhaites malheur
», conclut Alexis Mac Allister. «
On se voit jeudi et je te souhaite bonne chance, car tu en auras besoin.
» «
Je te souhaite la même chose
», lance son frère aîné Kevin pour finir l’appel.
Le duel est bien lancé
!