VÉRONIQUE LAMQUINLa commune pourrait être tentée de cadrer les horaires des matches. Mais, pour respecter le chœur des supporters, il faudra jouer le samedi ou le dimanche… Dominique Duchesnes.L’avenir du stade Marien est posé. À court terme, l’organisation des matchs à risque de D1A n’a pas encore été autorisée. À moyen terme, le club souhaite s’étendre et donc déménager. prevnext
« Je rêve depuis que je suis tout petit de monter en D1… Si, pour ça, on doit quitter le stade Marien, je vais pleurer toutes les larmes de mon corps. C’est notre maison ! L’Union, c’est plus qu’un club de foot, c’est une famille, le stade fait partie de l’histoire. Mais si on veut grandir, il faut sans doute qu’on déménage. » Jean Van Roy, alias le brasseur Cantillon, est né Unioniste, son arrière-grand-père y venait déjà, en voisin de la rue du Melon. Son dilemme jaune et bleu, nombre de supporters du club bruxellois le partagent. C’est que « l’écrin fabuleux » ne souffre guère les adaptations, a fortiori les extensions. La façade est classée, le parc Duden qui le borde aussi…Pourtant, le titre charrie son lot de contraintes, notamment pour les infrastructures. « Nous allons investir, cet été, un peu plus d’un million d’euros. De quoi installer un chauffage au sol pour le terrain, et un éclairage plus puissant », confirme Philippe Bormans, CEO du club. De timides améliorations, qui ne suffiront pas à propulser « au top » la visite au stade forestois. « Nous sommes limités à 9.000 places, dont 80 % non couvertes. Dans la tribune avec le toit, il y a une centaine de sièges et des bancs… C’est un peu daté ! Mais je ne peux pas changer les tribunes en un jour », se résigne le patron. Bien décidé, pourtant, à le faire à l’horizon de deux ou trois saisons. « On veut s’installer en Division 1A sur le long terme, et y être un club en bonne santé. Pour cela, nous avons besoin de doubler notre budget, ce qui suppose d’augmenter les revenus, donc les recettes du ticketing. » Donc la capacité du stade. « Exact, ce qui laisse deux options », pose Philippe Bormans. « Soit on peut rester ici, mais cela suppose de toucher aux infrastructures actuelles, et de gérer la mobilité et la sécurité sur un site un peu limité. Soit on en construit un nouveau. »Des inconnues pour la saison prochaineUne équation en réalité un peu plus compliquée car, dès la saison prochaine, se pose la question de l’organisation des matchs à risque au Marien. « Ça ne va pas être simple, mais on a déjà montré qu’on savait le faire, contre Malines ou Genk. Je comprends que la discussion soit ouverte chez certains, mais, techniquement, nous sommes en ordre pour accueillir 9.000 personnes. Même si ce n’est pas facile pour le quartier », reconnaît le CEO. Le débat n’est pas tranché, confirme la commune. Forest, en l’occurrence, car l’Union Saint-Gilloise joue sur un site appartenant à la Donation royale, qui l’a confié, via un droit d’emphytéose, à la commune de Saint-Gilles, mais l’espace public environnant est bien forestois.« On essaie de travailler avec le club, la police, les supporters les riverains, on a encore un peu de temps », souligne Claire Roekens, cheffe de cabinet du bourgmestre (Ecolo) de Forest. « En termes de sécurité et de capacité, l’agrément du stade reste valable, les normes sont les mêmes pour la D1A et la D1B, la montée n’entraîne donc pas de changement majeur sur papier. Mais, clairement, l’affluence sera potentiellement plus importante, ce qui aura un impact sur le quartier.Un cadre incompatible avec l’organisation de certaines rencontres à risque (contre Anderlecht, le Standard, Bruges, l’Antwerp) ? Cette question reste ouverte. Le club, même s’il s’en défend, pourrait par ailleurs être tenté d’« aller sur du plus grand », afin de maximiser le public et donc les recettes… « Nous n’avons pas de posture de principe quant à la délocalisation des matchs », confirme Claire Roekens. « Mais cela reste quand même la prérogative du bourgmestre d’autoriser ou pas un match, et au club, le cas échéant, de trouver des alternatives. Notre préoccupation, c’est la sécurité et la soutenabilité, pour les riverains et le parc, des rencontres. »« Donner des perspectives aux riverains »Beaucoup de points d’interrogation pour une saison qui démarre dans trois mois ? « Nous devons notamment fixer la capacité d’accueil des supporters adverses pour la mi-juillet, il s’agit de fixer le nombre et les conditions. C’est tout l’objet de nos réflexions, au sein de la cellule de sécurité. » Au sein de laquelle siège la zone de police Midi, qui a développé une certaine expertise en matière footballistique, puisqu’elle opère aussi sur le territoire anderlechtois… « Notre option privilégiée reste le Marien », résume Claire Roekens. Sans pouvoir garantir que tous les matchs auront lieu là. « Nous ne disons pas au club que cela n’arrivera jamais, une délocalisation. » Vers quels cieux ? Les options ne sont pas légion… Ni la direction ni les supporters n’imaginent migrer à Molenbeek (les éternels rivaux), et l’exil forcé (par les travaux de rénovation) au stade Roi Baudouin n’a pas laissé de bons souvenirs : trop loin, trop froid, un tue-l’âme du club. Reste Anderlecht. Mais, jusqu’ici, aucune demande d’asile footballistique n’a été introduite par la RUSG. « Si on peut s’entendre sur une vision à long terme pour le club, et donner des perspectives aux riverains, en leur garantissant qu’ils ne vont pas vivre dix ans avec les nuisances de certains matchs, cela pourrait être acceptable pour eux », veut croire Philippe Bormans.Un nouveau stade mais où ?Le CEO explore donc le terrain bruxellois, à la recherche d’un site pouvant accueillir « le stade le plus vert, le plus écologique d’Europe », que le club est prêt à construire. Plus moderne, aussi, avec des espaces VIP. Les critères sont pour le moins restrictifs : pas question de s’éloigner trop du Marien, « qui serait conservé comme terrain d’entraînement et cadre pour l’académie de jeunes », ni, surtout, de quitter les deux communes associées au matricule 10. Hors de question, donc, de lorgner un stade Roi Baudouin hypothétiquement rénové ? « Hors de question ! Ce serait tuer le club », ferme le CEO. « On ne veut pas que les supporters doivent rouler une demi-heure pour aller au stade ! » Reste donc Forest, et tous les regards convergent vers le Bempt, dans le bas de la commune, près de la chaussée de Neerstalle et de l’usine Audi. Problème : le site est occupé par un complexe sportif, qu’on ne peut gommer d’un trait d’architecte… Un dossier qui relance la question de la place du sport de haut niveau dans la ville, et du degré d’investissement (politique voire financier) des autorités… Avec, en filigrane, un tabou absolu : l’idée (naïve et néanmoins rationnelle) de regrouper deux clubs de D1A et les Diables dans un unique stade national…