Karel Geraerts apprécie la vie à Gelsenkirchen même si sa famille, restée en Belgique, lui manque beaucoup.S. Simon / Imago
Le nouveau coach de Schalke évoque sa nouvelle aventure mais également l’Union et la perte du titre face à Bruges. Avec, de son côté, une certaine paix intérieure qui n’efface malgré tout pas le trauma. next
Le vent, la pluie et les feuilles mortes qui s’écrasent sur ses flancs n’altèrent en rien la beauté de la Veltins Arena. C’est là, dans l’un des (très) nombreux couloirs de l’antre de Schalke 04, que Karel Geraerts a décidé d’évoquer son nouveau projet. D’ailleurs, son arrivée à Gelsenkirchen a coïncidé avec un certain renouveau. Pour un club qui en a bien besoin, 15 e en deuxième division allemande, mais aussi pour lui, quatre mois après avoir été poussé dehors par la direction de l’Union Saint-Gilloise. Mais comme un adolescent qui atténuerait dans les bras d’une autre la peine d’une aventure amoureuse (in)achevée, le Limbourgeois de 41 ans assure n’avoir aucun « hard feeling » envers son ancien club, qu’il chérit toujours autant.
Karel Geraerts, vous avez passé quatre mois sans club après votre départ de l’Union Saint-Gilloise. Comment avez-vous vécu cette période ?
Parfois, ce fut dur. J’en ai profité pour passer du temps avec ma famille, une première après quatre ans à l’Union. Mais quand les championnats ont repris… (il gémit) J’ai regardé beaucoup de matches. Je sentais qu’une opportunité allait se présenter, car on sait que durant cette période des entraîneurs doivent laisser leur place. J’ai reçu de l’intérêt de plusieurs clubs mais Schalke était ma priorité.
Après votre belle saison à l’Union, il était étonnant de ne pas vous voir rebondir tout de suite…
Je pense que ce sont les circonstances, le fait que quand j’ai quitté l’Union, 95 % des clubs avaient trouvé un coach et avaient déjà entamé leur préparation. Les 5 % restants ne correspondaient pas à mes attentes. J’aurais pu sauter déjà en juillet sur certains projets mais je voulais trouver ce qui me correspondait.
Votre nom a été cité à de nombreux endroits.
Beaucoup de rumeurs !
Même concernant Bruges et le Standard ?
Les deux clubs me voulaient. Raison pour laquelle je les ai écoutés mais voilà, au bout du compte, ils ont finalement fait des choix différents.
Ces quatre mois de repos vous ont-ils forcé à faire le point sur votre carrière ?
J’ai fait cet exercice pour identifier ce que j’ai bien fait, ce que j’ai mal fait. Je me suis intéressé à ce qui se faisait à l’étranger. Je me suis préparé à débarquer dans un club en automne, probablement en difficulté, sans préparation avec l’équipe pour mettre en place mes idées, ce qui est très différent. Et puis, je le répète mais j’ai aimé passer du temps avec ma famille. Pour être honnête, elle me manque beaucoup car elle est forcément restée en Belgique. C’est un gros changement pour moi.
Quitter la Belgique, était-ce une priorité dans votre évolution personnelle ?
Non, pas du tout. C’est simplement le premier club avec lequel j’ai eu un très bon feeling, qui était réciproque.
Ce n’était donc pas pour oublier la triste issue de la saison dernière, avec cette défaite conte Bruges lors de l’ultime journée des Playoffs. Combien de temps vous a-t-il fallu pour oublier ?
Quelques semaines. Pas pour oublier, car ça c’est impossible. Mais pour mettre ça de côté. Il m’est arrivé plusieurs fois, durant la nuit, de me réveiller et de voir ce but de Shion Homma. Je le vois encore aujourd’hui. Mais bon, c’est comme ça, c’est le foot. Nous pouvons rester fiers de ce que nous avons accompli. Même si c’est dommage… (il le répète trois fois).
Avez-vous repensé à ce que vous auriez dû faire, ou ne pas faire, en tant que coach ?
J’ai analysé la rencontre. Pour moi, ce match, nous le gagnons 97, 98 fois sur 100. Bruges n’était pas dangereux, il nous manquait simplement ce deuxième but. Qu’aurais-je pu faire ? Mettre un défenseur de plus sur le terrain ? Ce n’était pas dans ma philosophie. Je ne voulais pas que l’on recule. Je n’ai aucun regret concernant mes choix. J’ai changé une seule fois mes plans durant la saison, lors du match de Coupe à l’Antwerp, mais pour le reste, je suis resté fidèle à ma philosophie.
Que pensez-vous de l’Union actuelle, qui continue d’impressionner ?
Évidemment, cela me fait plaisir et cela me rend fier. Cela fait des années que je dis qu’il ne faut pas sous-estimer le travail acharné de Chris O’Loughlin, Alex Muzio et Philippe Bormans. Ils donnent corps et âme pour le club. Ce qui se passe en ce moment, après un été où beaucoup de joueurs et le coach sont partis, cela prouve que l’Union est stable.
À vous entendre, il n’y a donc pas de rancune vis-à-vis de votre départ surprise, alors que vous désiriez rester ?
Quand vous ne trouvez pas d’accord, il y a forcément de la tension. Mais les discussions ont toujours été correctes. Les premiers jours après mon départ, j’étais évidemment très fâché mais aujourd’hui, c’est du passé. Nous n’étions pas loin d’un accord. Durant la saison, j’aurais pu partir plus tôt mais j’ai tout bloqué, tout fermé pour ne pas dévier de notre objectif, celui d’être champion. Je n’étais pas contre rester à l’Union avec mon contrat mais voilà, ils avaient leurs principes et leurs idées. Je le respecte.
Un retour, un jour, à l’Union, n’est donc pas à exclure ?
Bien sûr, j’ai gardé des bons contacts avec le club, les joueurs aussi. J’avance, c’est comme ça que je fonctionne dans la vie.
Karel Geraerts, dans quel état d’esprit êtes-vous aujourd’hui, à la tête d’une équipe mythique comme Schalke 04 ?
Très bon, j’ai été très bien accueilli. J’ai tout de suite senti le fait que j’étais dans un grand club, dans tous les domaines. J’ai la chance de découvrir un nouveau pays, une nouvelle culture et ce pour la première fois. Ça me plaît
! Tout tourne autour du foot à Gelsenkirchen. Malgré cette période difficile, il y a dans ce stade, comme dans beaucoup de stades allemands, toujours beaucoup de monde. Et la Bundesliga 2 est, comme sa grande sœur, un top championnat. Je n’ai par contre pas encore eu l’occasion de découvrir la région car j’ai beaucoup de travail pour l’instant
! Mais il y a deux semaines, alors que je m’installais dans mon appartement, cinq personnes, cinq voisins sont tout de suite venus m’aider. Pour vous dire à quel point les gens sont chaleureux.
Même si vous ne parlez pas allemand, ce qui vous a été reproché par la presse locale…
Ce n’était pas un problème pour le club. Je suis actuellement des cours pour apprendre, car au-delà de ma fonction de coach, cela m’intéresse. Et je comprends 80, 90
% de l’allemand que j’utilise parfois avec mon staff, pour m’exercer. Quand je le maîtriserai parfaitement, je l’utiliserai avec les médias, mais pas avant
!
Schalke était dans une très mauvaise position avant votre arrivée. Beaucoup d’entraîneurs ont défilé ces dernières années… Cela ne vous a-t-il pas fait peur ?
Non, pas du tout. Car quand j’ai parlé avec la direction du club, ils m’ont parlé de foot, tout le temps. Je sentais qu’il y avait un projet, comme quand j’ai démarré à l’Union Saint-Gilloise. C’est un défi et j’aime les défis.
Quel est-il ?
Stabiliser le club. On ne parle pas de classement. Mais vous me connaissez bien… Je suis quelqu’un d’ambitieux. Je veux faire le mieux possible, pas simplement parvenir à sauver le club. Pour l’instant, nous devons enchaîner les matches et les résultats.
J.B.
Hoefkens et Geraerts coéquipiers à Bruges en 2010.
Longtemps cité au Standard pour succéder à Ronny Deila, Karl Geraerts n’a finalement pas été retenu par la direction du Standard. Il ne le dit pas, mais dans les négociations, opter pour un coach qui avait encore des choses à prouver en Belgique, comme Carl Hoefkens, était certainement plus facile. L’entraîneur de Schalke juge les premiers mois à Sclessin de son ancien coéquipier à Bruges. «
Il a connu un début de saison compliqué car je pense qu’il lui manquait des joueurs. Le Standard a fait un très bon choix concernant Carl et je suis heureux de voir que la direction a gardé confiance en lui malgré quelques mauvais résultats. Aujourd’hui, il prouve qu’il a de bonnes idées. Nous avons suivi les mêmes cours, ce qui nous a permis d’échanger sur notre vision du football. Désormais, c’est à lui de confirmer sur le bord du terrain qu’il a beaucoup de qualités en tant que coach.
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