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octobre 2021, il y a
quasiment un an jour
pour jour. L’Union
saint-gilloise est mal-
menée sur le terrain du Cer-
cle Bruges. À la mi-temps, Fe-
lice Mazzù agit en réalisant
deux changements, dont l’en-
trée au jeu de Senne Lynen. Si
les Unionistes décrochent fi-
nalement les trois points
(0-3), ceux-ci sont vite balayés
des esprits par la grave bles-
sure encourue par le milieu
de terrain belge : après un
contact anodin avec Dino Ho-
tic, Lynen se blesse au genou
et doit déjà sortir du terrain
avant l’heure de jeu.
Quelques jours plus tard, le
verdict tombe et il est terri-
ble : les ligaments croisés du
genou sont touchés. Le joueur
doit entamer une revalida-
tion de plusieurs mois.
Un an plus tard, de l’eau a
coulé sous les ponts. Revenu
rapidement dans le circuit,
Lynen enchaîne les titularisa-
tions en championnat et s’of-
fre même un but en Europa
League lors du déplacement à
l’Union Berlin.
Retour sur cette année
écoulée lors de laquelle Lynen
est passé de l’enfer au paradis.
. Un processus
étape par étape
Un mois après sa blessure,
Senne Lynen passe sur le
billard avant d’enchaîner
avec une longue rééducation.
Six fois par semaine, le joueur
de 23 ans passe plus de deux
heures quotidiennement sur
la route – avec sa compagne
au volant vu son impossibi-
lité à conduire – pour rejoin-
dre le centre de rééducation
“Motion To Balance” à Genk et
y travailler d’arrache-pied
avec le spécialiste Bart Dinge-
nen. “Quand on regarde dans le
rétroviseur, on se rend compte
de tout le chemin parcouru”, ex-
plique cet expert internatio-
nal des blessures au ligament
croisé qui s’est occupé de Ly-
nen pendant plusieurs mois.
“Au tout début, Senne avait des
capacités très limitées. Il a dû
accepter le processus, qui se dé-
roulait étape par étape. Il a
réussi à rapidement changer
d’état d’esprit en regardant vers
l’avant. Nous avons aussi essayé
de créer un environnement posi-
tif autour de lui pour qu’il se
sente mieux chaque jour.”
Durant cette période, Senne
Lynen retrouve ses coéqui-
piers à Lier un jour par se-
maine. Un rendez-vous lui
permettant de garder contact
avec l’équipe mais aussi avec
le staff médical. “Il a réalisé sa
revalidation en dehors du club
car il s’agissait d’une longue
blessure”, avance Stephen Van
den Berg, l’un des kinés de
l’Union. “Mais nous avions des
rapports hebdomadaires, donc
nous savions dans quelle direc-
tion il allait. Il a commencé à re-
venir au club à partir de décem-
bre. Au début, il venait pour des
soins car le travail de réhabilita-
tion était réalisé avec Bart Din-
genen. Il est revenu doucement
dans le groupe lors du mini-
stage organisé avant les
playoffs. Même s’il ne faisait pas
la même chose que ses coéqui-
piers, c’était mentalement im-
portant de revivre au quotidien
avec l’équipe. Pendant ce stage,
il faisait des exercices de renfor-
cement en salle ou des petits
exercices avec ballons.”
. Bonne réaction du corps
Après plusieurs mois à tra-
vailler de manière indivi-
duelle, loin des exploits spor-
tifs réalisés par l’Union, Senne
Lynen fait son réel retour
dans le groupe lors de la pré-
paration d’avant-saison. À
nouveau, les choses se font de
manière progressive pour évi-
ter tout risque de rechute.
“Les recherches scientifiques dé-
montrent qu’il faut en moyenne
huit mois et demi pour revenir
au top, avance Bart Dingenen.
Le staff a été intelligent en le fai-
sant jouer d’abord une ving-
taine de minutes en amical,
puis une mi-temps, puis une
heure de jeu. Il faut savoir que
tout le monde ne revient pas au
top comme il l’a fait, en enchaî-
nant souvent deux matchs par
semaine dont un de niveau
européen. Son corps réagit bien
mais ce n’est pas une coïnci-
dence : c’est le résultat d’un gros
travail au quotidien.”
En concurrence avec Came-
ron Puertas pour remplacer
numériquement Casper Niel-
sen dans le onze de base de
l’Union, Senne Lynen est titu-
larisé dès le premier match
de championnat, à Saint-
Trond. Le milieu de terrain ne
laisse ensuite que des miettes
à ses concurrents en com-
mençant douze des treize ren-
contres jouées cette saison
par l’Union. “Je n’avais pas
prévu que ça aille si vite, ra-
conte Senne Lynen. J’avais
parlé avec le coach qui avait
beaucoup de confiance en moi
mais qui m’avait dit de prendre
mon temps. Dès la préparation,
j’ai pu atteindre rapidement un
bon niveau. Je pensais que cela
allait prendre un peu plus de
temps mais c’est revenu très
vite. Les mois de travail hors des
terrains ont été longs mais tout
s’est ensuite enchaîné une fois
sur le terrain. J’ai fini par
oublier ma blessure.”
. Une belle récompense
Avec cette soirée du 8 sep-
tembre 2022 qui restera à ja-
mais gravée dans la mémoire
du joueur. Ce soir-là, face à
l’Union Berlin, Lynen inscrit
l’unique but du match et of-
fre trois points importants
dans la poursuite du rêve
européen des Unionistes. “De-
puis ma blessure, je suis passé
par plusieurs émotions différen-
tes. Il y a des bons moments et
d’autres plus compliqués, il y a
de la joie mais aussi des décep-
tions. Marquer un but en
Europa League, après tout ce
que j’ai vécu, c’est indescripti-
ble, en sachant que je ne pou-
vais même pas marcher il y a
quelques mois. Sur le moment,
j’ai eu un boost d’adrénaline en
allant fêter le but face à nos
supporters. Le soir, dans mon lit,
j’ai repensé à tous ces mois de
galère.”
Ce but est aussi une belle
récompense pour le corps
médical qui a suivi Senne Ly-
nen. C’est le cas de Bart Dinge-
nen qui suit attentivement
ses performances. “Je me suis
beaucoup investi dans le pro-
cessus quotidien de la remise
sur pied de Senne. Quand un
joueur comme lui marque un
but en Europa League, c’est clai-
rement un moment d’émotion.
Quand un joueur se fixe l’objec-
tif de retrouver les terrains avec
un bon niveau et que cet objec-
tif est rempli, c’est assez grati-
fiant. Nous avons travaillé telle-
ment dur que sa réussite ac-
tuelle est belle à voir.”
. Profiter du football
Pour beaucoup d’observa-
teurs qui ont suivi son évolu-
tion depuis sa blessure, Senne
Lynen est même revenu plus
fort sur les terrains, les datas
étant là pour le confirmer.
Une situation qui est logique,
vu le gros travail de renforce-
ment effectué durant les pre-
miers mois de sa revalidation.
“C’est un garçon qui bosse énor-
mément, lance Stephen Van
den Berg. Il sentait qu’il allait
être très fort à son retour et cela
a été le cas : il est arrivé ultra fit.
Sa façon d’enchaîner les rencon-
tres ne m’étonne pas trop car sa
blessure fait partie du passé
dans sa tête. Il a réussi à créer
quelque chose de positif à partir
d’une expérience négative.”
Sous contrat jusqu’en
juin 2024, Senne Lynen a pu
tirer les leçons de la première
grosse blessure de sa carrière
en rebondissant très rapide-
ment. Dans les prochaines se-
maines, le Belge devra encore
élever son niveau s’il veut gar-
der sa place de titulaire, vu la
concurrence encore plus
grande depuis l’arrivée de
José Rodriguez. “La principale
leçon de cette année écoulée de-
puis ma blessure est qu’il faut
profiter du fait de pouvoir jouer
au football, conclut Senne Ly-
nen. C’est le plus beau métier
du monde et on doit bien garder
en tête les moments comme
ceux vécus à Berlin. Quand je
suis sur le terrain, je ne pense
jamais à mon genou. Par contre,
je me concentre désormais pour
rentrer plus intelligemment
dans les duels, ce que je n’avais
pas fait le jour de ma blessure.
Pour le reste, je sens que cette
année m’a rendu plus fort. Je
suis physiquement prêt pour les
prochaines échéances.”
Et elles sont nombreuses
avec neuf matchs au pro-
gramme en octobre. Un mois
qui devrait avoir une saveur
beaucoup moins sombre qu’il
y a un an.
“Bien que les attentes
ne soient pas trop hautes”
Philippe Bormans, le CEO du club,
ne met pas de pression sur ses joueurs.
E n battant OHL, l’Union
serait assurée de dépas-
ser son adversaire et d’entrer
dans le top 5. Du côté de la
direction, on préfère toute-
fois ne pas trop s’attarder
sur le classement à l’heure
actuelle. “L’essentiel était sur-
tout de ne pas rater notre dé-
part en championnat mais
aussi en Europe”, lance Phi-
lippe Bormans, le CEO du
club. “Le mois qui arrive sera
compliqué avec l’enchaîne-
ment des matchs. Nous pour-
rons faire un premier bilan en
novembre. Mais la direction ne
mettra pas de pression sur les
joueurs. Nous n’avons pas le
budget pour affirmer haut et
fort qu’il faut, par exemple,
faire partie du top 4. Est-ce que
les gens ont sous-estimé
l’Union ? Peut-être mais c’est
normal. Chaque saison, ce sont
les 5 ou 6 grands clubs qu’on
place dans le haut du classe-
ment dans les pronostics. Ce
n’est pas grave pour nous, c’est
bien que les attentes ne soient
pas trop hautes. Nous voulons
continuer à grandir en faisant
des petits pas vers l’avant.”
Il n’empêche, l’équipe de
Karel Geraerts sera une sé-
rieuse candidate aux
playoffs si elle continue sur
sa lancée. Le mois d’octobre,
lors duquel les Unionistes
joueront neuf matchs, sera
crucial. “La saison dernière,
nous étions contents quand le
contenu des matchs était bon,
continue Bormans. Cette sai-
son, c’est difficile de bien jouer
le dimanche quand l’équipe a
fait un déplacement européen
le jeudi. La grande différence
entre les deux est
qu’aujourd’hui, nous sommes
contents quand on prend des
points. Nous verrons bien où
tout cela va nous mener. Nous
voulons en tout cas continuer
sur les trois tableaux le plus
longtemps possible.”
Philippe Bormans est aussi
revenu sur le choix de la
RTBF de diffuser les matchs
d’Anderlecht à la télé et non
ceux de l’Union, diffusés sur
Auvio, lors des premières
journées européennes. “C’est
dommage de ne pas trouver un
équilibre entre les clubs : la
chaîne néerlandophone pour-
rait diffuser une équipe et la
chaîne francophone l’autre.
Mais c’est leur choix, nous n’al-
lons pas intervenir là-dedans
et nous ne sommes pas du tout
vexés. Chacun fait son travail.”