Union Saint-Gilloise
Après deux années de purgatoire au Heysel en raison de travaux de conformité, les supporters de l’Union Saint-Gilloise ont retrouvé avec joie leur Parc Duden. « C’est beaucoup plus agréable de jouer chez nous », confirme Olivier Dumonchaux, secrétaire du club. « Il y a un peu plus de monde parce que nos supporters habitent près du stade. » Un mouvement qu’en interne, on espère voir s’amplifier dans les semaines à venir si les résultats et l’actuelle troisième place en D1B se confirment.
Deux éléments clés qui sont tombés à point nommé dans la foulée de ce qui pouvait logiquement être vu comme une source d’inquiétude par les fans d’un club à part en Belgique : la reprise par Tony Bloom, un homme d’affaires anglais qui a fait fortune dans les paris sportifs et détient le club de Brighton & Hove Albion. « Il y a toujours des gens plus inquiets que d’autres », se contente de lâcher Dumonchaux.
Pourtant, même s’ils étaient conscients que Jürgen Baatzsch n’avait plus les reins assez solides dans un univers aussi concurrentiel que la D1B, les partisans du matricule 10 émettent encore quelques doutes concernant le projet à long terme d’une nouvelle direction qui n’a pas hésité à faire table rase du passé en séparant de Marc Grosjean, au club depuis trois saisons, et en reconstruisant un noyau où aucun joueur belge n’a été greffé. Et puis, il y a l’épisode symbolique des entraînements à Lier.
Ne dérogeant pas à la règle du manque d’infrastructure sportive dans la capitale, l’Union Saint-Gilloise s’est expatriée dans les anciennes installations du Lierse pour ses séances d’entraînement. Mécontents de ne plus pouvoir voir ses protégés en semaine, certains supporters en ont touché un mot à Charles Piqué. Le bourgmestre de la commune a incité l’Union à faire un geste ce qui est le cas puisque certaines séances seront données au Parc Duden lorsque les circonstances le permettent.
Un bon signal comme celui du rajeunissement des suiveurs de l’Union constaté depuis quelques saisons et l’arrivée combinée des nouveaux habitants de Saint-Gilles, les fameux « bobos », mais aussi de travailleurs européens qui ont découvert le charme de ce club via Cocchiere, joueur de l’Union et attaché parlementaire à l’UE.
Ils vivent dans l’ombre des mauves
L’histoire a le don de se rattraper.
Alors que les dirigeants d’Anderlecht
et de l’Union voulaient organiser
une joute amicale durant la
préparation, l’indisponibilité des
stades des deux clubs concernés a
fait tomber le projet à l’eau.
C’était sans compter sur le tirage
au sort de la Coupe de Belgique
qui offre un seizième de finale
entre Anderlecht et l’Union. Une
première depuis 39 ans et déjà un
seizième de finale de Coupe enlevé
par Anderlecht (2-0). « C’est un
match à part. Une respiration dans
la saison », confirme Olivier Dumonchaux,
le secrétaire d’un club
11 fois champion de Belgique, qui
ne craint pas son hôte du soir.
« Cette rencontre, c’est aussi la prédominance
régionale avec les deux
meilleures équipes de Bruxelles. »
Cela augure en tout cas une belle
« zwanze » qui ne sera pas uniquement
suivie à Saint-Guidon ou depuis
le parvis de Saint-Gilles. C’est
tout Bruxelles qui sera en effervescence
pour un derby qui offre aussi
l’occasion de mettre en lumière
le football dans la capitale.
En cette saison 2018-19, sept clubs
bruxellois évoluent dans des divisions
nationales : Anderlecht en
D1A, l’Union en D1B, le RWDM
en D1 amateurs et le quatuor Léopold-Jette-Ganshoren-Stockel
en
D3 amateurs. Et si on reconnaît aisément
à Anderlecht son statut de
« porte-drapeau » et de « locomotive
», il n’est pas aisé de vivre
dans l’ombre du plus grand club
du pays qui fait office d’épouvantail
notamment lorsqu’il convoite
certaines jeunes pépites. « Avec
Anderlecht, on a un contrat
entre guillemets : il
consiste à venir nous
voler nos
meilleurs éléments » ou encore « Le
club ne veut pas faire d’accord : on
peut leur renseigner des bons
joueurs chez nous mais ils ne
veulent pas prêter un joueur de
leur réserve. » Une relation entre
Goliath et David qui n’a rien
d’anormale et surtout qui n’est
pas l’unique préoccupation des
clubs moins huppés que le RSCA.
Ceux-ci ont d’autres chats à fouetter
au quotidien où ils se battent
tous les jours pour vivre. Voire
survivre.
Comme toujours le nerf de la
guerre, c’est l’argent. Si cela ne
pose pas vraiment de problème à
l’Union Saint-Gilloise, qui navigue
désormais sous pavillon anglais
depuis l’arrivée de Tony
Bloom, ou au RWDM – « Financièrement,
on est très bien notamment
grâce à de très bons sponsors
qui veulent partager leur image
avec nous », indique Thierry
Dailly –, pour les formations
évoluant en D3 amateurs, c’est
une autre paire de manches. « Il
faudrait un deuxième Marc Coucke
qui se présente chez nous », ironise
Joseph Draeck, président de Stockel
qui fait ses premiers pas dans
le football national. Au Léopold,
on tire clairement la sonnette
d’alarme alors que le club est un
historique et fêtera son 125e anniversaire
cette saison. « Tenir ce
club tient du miracle », estime
Jacques Maricq. « Je suis président
depuis 1964 et cela devient lourd à
porter. Le club est clean grâce à un
sponsor principal qui s’appelle
« Maricq ». Je veux vendre mais je
ne parviens pas à trouver quelqu’un.
Après moi, qui va reprendre
les rênes du club au niveau financier
? »
Un manque d’argent aux
raisons multiples, à
commencer par les
assistances faméliques. Si l’Union
se montre satisfaite de son retour
au Parc Duden, il ne parvient pas
encore à enclencher la planche à
tickets. Au RWDM, où on tourne
dans les mêmes chiffres à savoir
3.000 spectateurs par match, on
fait la moue. « On a presque les
mêmes chiffres d’abonnement que
la saison dernière, je suis un peu déçu
», reconnaît Dailly. Quant aux
quatre autres formations, elles
sont cantonnées à la venue des
habitués et doivent même faire
face à un phénomène pour le
moins étrange. « Il y a plus de
monde quand on joue en provinciale
qu’en nationale », constate
Serge Debacker, entraîneur de
Ganshoren depuis 20 ans, qui
poursuit : « Or, quand vous êtes
dans les séries le budget est plus important,
les joueurs plus gourmands
et les déplacements sont
plus longs. » À la barre de Jette
mais également vice-président des
clubs bruxellois, René Kruys
avance d’autres pistes qui expliquent
les difficultés financières.
« Le problème est double : le
sponsoring est en baisse et le public
participe de moins en moins aux
buvettes et à la vie associative du
club. »
Alors, pour nouer les deux bouts,
il faut compter sur les pouvoirs
publics. En fonction de leur rang
dans la hiérarchie, les clubs
bruxellois reçoivent des subsides :
50.000 euros pour une formation
en D3 amateurs, 85.000 en D2
amateurs, 100.000 en D1 amateurs,
200.000 en D1B et 500.000
en D1A. Des aides publiques auxquelles
s’ajoutent des coups de
pouce de la commune. « Nous, on
a de la chance d’avoir l’échevin des
sports à Jette qui nous permet de ne
pas payer l’eau, l’électricité ou l’utilisation
de la buvette », reconnaît
Kruys. Loin d’être un cas isolé.
« Molenbeek n’est pas une commune
très riche et est sous tutelle
depuis dix ans mais elle nous soutient
comme elle peut », indique
Dailly.
Par contre, Molenbeek comme les
18 autres communes sont impuissants
face à l’autre grand problème
rencontré par les clubs : le
manque de terrains. « Il nous en
faudrait un troisième mais c’est difficile
à trouver à Ganshoren. Cela
nous oblige à refuser des jeunes »,
explique Serge Debacker. « En
1990, on m’a contraint à une fusion
entre Leopold et Uccle », se souvient
Jacques Maricq. « À l’époque, il y
avait sept terrains. Aujourd’hui, il
en reste deux dans un état scandaleux
à Uccle et on a dû se délocaliser
en partie à Woluwe. » Secrétaire du
comité provincial du Brabant,
Marc Roosens connaît bien la problématique.
« Tous les clubs bruxellois
ont une liste d’attente. Il est clair
qu’il faut augmenter le nombre de
terrains mais le problème, c’est que
Bruxelles est étranglé. »
Des difficultés que les 19 bourgmestres
bruxellois auraient pu
aborder avant la rencontre entre
Anderlecht et l’Union. Mais, notamment
en raison de l’épisode de
l’Euro Stadium, seuls trois d’entre
eux dont Charles Piqué de SaintGilles
et Eric Thomas d’Anderlecht
ont accepté l’invitation du RSCA.
En 1975, l’Union de Heylens est passée tout près de battre le RSCA de Munaron
Une éternité : cela fait 39 ans qu’Anderlecht et l’Union Saint-Gilloise attendent de se retrouver en match officiel. En effet, la dernière rencontre qui a compté entre les deux équipes date du 31 octobre 1979. Le club saint-gillois, alors en Division 3, s’était incliné 2-0 au Parc Astrid en 16 es de finale de la Coupe de Belgique.
Si cette rencontre n’est pas restée dans les mémoires, l’avant-dernière confrontation entre les deux clubs bruxellois est par contre passée nettement moins inaperçue. Le 31 août 1975, également en Coupe de Belgique, les Unionistes avaient failli terrasser le grand Anderlecht qui, quelques mois plus tard, avait conquis son premier trophée européen (la Coupe des Coupes). Ce jour-là, l’inévitable Robbie Rensenbrinck avait offert la qualification à Anderlecht en marquant un but durant les prolongations. L’Union était passée à deux doigts de réaliser un des plus grands exploits de son histoire avec, à sa tête, Georges Heylens. Du côté anderlechtois, c’était alors un certain Jacky Munaron entre les perches qui allait fêter ses 19 ans quelques jours plus tard.
Vous souvenez-vous de cette rencontre ?
Georges Heylens :
Je me souviens qu’on avait une équipe extraordinaire. On avait des joueurs comme Jan Verheyen, Leen Barth (NDLR : le gardien qui venait d’être transféré … d’Anderlecht), Harald Nickel, André De Nul ou encore Edy De Bolle qui, pour l’anecdote, était aussi mon employé dans mon magasin. On était en Division 3 mais on avait une équipe pour jouer en D1, voire en Europe !
Jacky Munaron :Personnellement, j’étais arrivé l’année précédente à Anderlecht en provenance du FC Dinant. À l’entame de la saison 1974-1975, Anderlecht m’avait convoqué pour jouer un tournoi au Portugal. J’avais été élu meilleur gardien et Frankie Vercauteren meilleur joueur. En 1975-1976, je n’étais pas le gardien titulaire. C’était Jan Ruiter le numéro 1. C’était une vraie bête. Et, à l’époque, il n’y avait pas de tournante
comme aujourd’hui. Et sûrement pas avec Ruiter qui avait un caractère bien trempé (rires). Si j’ai joué contre l’Union, c’est qu’il était blessé ou suspendu. Si l’Union a failli nous battre, c’est qu’elle était vraiment très forte car il ne faut pas oublier que c’est la période où on a atteint trois fois d’affilée une finale européenne. Il y avait en tout cas du répondant en face. Je me souviens que, durant la même saison, l’équipe unioniste nous avait servi de « sparring-partner ». Ce jour-là, j’avais eu beaucoup de boulot (rires) !
Georges, que retenez-vous de vos trois ans et demi à la tête de l’Union ?
G.H. :L’Union, c’est mon deuxième club de cœur à Bruxelles. Je n’y ai que des bons souvenirs. C’est là aussi que j’ai conquis mon premier titre en tant qu’entraîneur (NDLR : en 1975-1976,
les Unionistes survolent le championnat de D3). Je me souviens qu’on avait fêté cela de manière fabuleuse. Il y avait 10.000 personnes qui étaient venues nous applaudir. L’année suivante, on a raté de peu la montée en D1 (NDLR : l’Union n’a plus jamais rejoué en Division 1 depuis la saison 1972-1973). Mais il y avait 12 à 15.000 personnes à chaque match à domicile. Le public était fidèle et fanatique.
J.M. :Et il y avait également tout un folklore qui a un peu disparu. C’était vraiment très bon enfant même si il y avait évidemment des noms d’oiseaux qui volaient en tribune (sourire). Moi, je venais de Wallonie (NDLR : il est né à Namur) et j’ai été étonné par exemple par le folklore de « Bossemans et Coppenolle ».
G.H. :Et il y avait un vrai plaisir de jouer. Je ne devais pas motiver mes joueurs. Il ne
fallait pas taper du poing sur la table. Et puis, dans les moments difficiles, les supporters doublaient le volume.
Ce n’est pas le cas à Anderlecht ?
G.H. :Si mais c’était une mentalité différente car le public a toujours été très exigeant.
J.M. :La différence, c’est qu’à Anderlecht, tu es toujours sous pression. Tu dois être présent en permanence. Au RSCA, les gens viennent pour voir du spectacle. Avant, 70 % des rencontres étaient spectaculaires. Ce n’est plus le cas aujourd’hui.
G.H. :Personnellement, je n’ai jamais entendu le public d’Anderlecht autant siffler ses joueurs que cette saison. Et il les hue même quand ils rentrent au vestiaire. Je n’entends plus les encouragements qu’il y avait avant.
Un pronostic ?
G.H. :Je n’ai pas encore eu l’occasion de voir l’Union jouer cette saison. Mais en tout cas, si Anderlecht est sorti, c’est le volcan dans les tribunes.
J.M. :Pour les joueurs de l’Union, la motivation vient d’elle-même. C’est une occasion unique pour eux de se montrer puisqu’ils n’ont rien à perdre, contrairement à Anderlecht. Logiquement, les Mauves devraient l’emporter mais, en Coupe, il y a toujours des surprises et des imprévus. Et puis, la Coupe n’a jamais été non plus le fort des Anderlechtois.
Hein Vanhaezebrouck
Hein Vanhaezebrouck est parfaitement conscient que la visite de l’Union Saint-Gilloise est autant une aubaine incroyable qu’un match piège par excellence. « Quand j’étais à Gand, j’avais utilisé l’image de l’Union pour parler d’un « petit » club et certains, là-bas, l’avaient mal pris », explique-t-il. « Or ce n’était pas du
» tout mon intention : l’Union, je sais tout ce qu’elle représente, historiquement parlant, et je n’ai certainement jamais voulu lui manquer de respect. Cela fait en tout cas plaisir de revoir cette équipe à ce niveau. Et ce serait encore mieux si, à terme, elle montait en D1A.
Pour cette rencontre, Vanhaezebrouck n’a pas voulu confirmer si Boeckx allait recevoir une chance entre les perches ni à quels changements il comptait procéder avec ses joueurs de champ. « Cette rencontre est terriblement importante puisque la Coupe est un objectif concret. À Trnava, certains n’avaient pas donné ce petit supplément d’âme qui aurait dû nous permettre de faire la différence. Contre le Standard, on a longtemps oublié de concrétiser nos occasions Méfiance, donc, parce qu’offensivement, c’est du costaud à
» l’Union : Tau est un attaquant qui aurait sa place dans 11 des 16 équipes de D1A tandis que Niakité vient d’inscrire 8 buts en 5 matches. Je connais aussi très bien Tabekou, que j’ai eu sous mes ordres à Gand. Quand une équipe de division inférieure affronte Anderlecht, elle est généralement deux fois plus forte. Je me souviens d’un match au cours duquel j’avais affronté le Sporting avec Harelbeke, j’avais sans doute livré l’un des meilleurs matches de ma carrière.