Les deux entraîneurs allemands originaires
de Stuttgart s’affrontent ce jeudi
lors du duel entre Liverpool et l’Union.
Q
uinquagénaires, Al-
lemands et originai-
res de Stuttgart :
d’entrée de jeu, certaines
ressemblances frappent
quand on compare Jürgen
Klopp et Alexander Blessin,
les entraîneurs de Liver-
pool et de l’Union qui s’af-
frontent ce jeudi soir. En
creusant un peu plus loin,
on se rend compte que les
deux coachs ont d’autres
similarités que ce soit dans
le style de jeu, dans la com-
munication avec leurs
joueurs et même… dans
leur style vestimentaire.
Analyse avec notre consul-
tant football, Alex Teklak.
. Le gegenpressing
comme philosophie
Un homme a influencé
les deux entraîneurs dès
leurs débuts sur un banc
de touche : Ralf Rangnick,
surnommé le “Professeur”,
et vu comme le père du
“gegenpressing”. Si Klopp le
considère comme “l’un des
meilleurs entraîneurs du
monde”, Blessin doit beau-
coup à celui qui l’a fait ve-
nir à l’Académie de Leipzig
alors qu’il travaillait…
dans les assurances.
Klopp et Blessin ont en-
suite tous les deux mis en
place avec leurs équipes
respectives cette idée d’un
pressing haut combinée à
la volonté de récupération
du ballon quelques secon-
des seulement après l’avoir
perdu.
“La direction de l’Union ne
recrute d’ailleurs que des
joueurs sachant répéter des
courses, analyse Alex
Teklak. Ce sont tous des gros
moteurs pouvant aligner les
efforts. Techniquement, des
joueurs comme Puertas ou
Lazare ont les qualités tech-
niques pour ensuite faire mal
une fois que le ballon est ré-
cupéré. Même si l’Union gal-
vaude parfois par manque
de fraîcheur et de lucidité vu
la grande d’ébauche d’éner-
gie demandé par ce pres-
sing.”
Jürgen Klopp a lui popu-
larisé ce gegenpressing à
Dortmund avec des
joueurs comme Reus,
Götze ou encore Lewan-
dowski avant d’amener
cette philosophie à Liver-
pool. “Il avait à chaque fois
des joueurs capables de met-
tre une grosse intensité dans
le jeu, explique Teklak. Dans
le pressing, c’est plus une
question de volonté à faire
les efforts qu’une question de
qualité technique. Mais dans
la phase qui suit le pressing
haut, cela fonctionne
d’autant mieux quand tu as
des bons joueurs. Avec son
trio de rêve composé de Fir-
mino, Salah et Mané, Klopp
avait les joueurs qu’il lui fal-
lait.”
. Une authenticité dans
leur communication
Assister à une confé-
rence de presse d’avant-
match d’Alexander Blessin
est l’assurance de passer
un bon moment. Le T1
unioniste, jamais avare
d’une blague, prend tou-
jours son temps pour ex-
primer ses pensées sans ja-
mais donner l’impression
d’en finir au plus vite. “Un
entraîneur doit systémati-
quement mettre un masque
en jouant le jeu des médias
s’il ne veut pas se faire des-
cendre, avance Alex Teklak.
Blessin l’a bien compris et est
tout de suite arrivé à l’Union
avec une attitude sympathi-
que en maniant facilement le
verbe. Je ne dis pas que c’est
une stratégie de sa part mais
transmettre une bonne
image auprès des médias est
devenu essentiel. Blessin a
l’art de faciliter le contact
avec les gens.”
Jürgen Klopp est de la
même veine que son ho-
mologue allemand, tout
aussi souriant et blagueur
face aux médias, se lançant
bien souvent dans de lon-
gues analyses complètes.
Mais avec une particularité
supplémentaire lui qui sait
aussi s’énerver comme ce
week-end après une erreur
d’arbitrage face à Totten-
ham. “Il manie aussi très
bien la communication mais
peut se montrer très cynique
envers l’adversaire ou l’arbi-
tre. Il n’est pas toujours bien-
veillant dans ses propos et ne
se montre pas toujours si
gentil que cela. Par contre,
comme Blessin, il va toujours
préserver ses joueurs face à
l’extérieur.”
. Une proximité
avec les joueurs
L’image est récurrente
dans le chef d’Alexander
Blessin. Lors de plusieurs
remplaçants, le coach alle-
mand a l’habitude d’enla-
cer le joueur sorti du ter-
rain tout en lui glissant un
mot à l’oreille. Lors des en-
traînements, il n’est pas
rare qu’il se montre proche
et tactile de ses joueurs au
moment de leur avancer
certaines consignes.
“Il est indispensable d’être
honnête avec le groupe sans
quoi il ne vous suivra pas”,
expliquait récemment
Alexander Blessin.
La preuve d’un côté hu-
main qui était aussi pré-
sent, à leur manière, chez
Mazzù et Geraerts. “Cette
proximité qu’a aussi Klopp à
Liverpool est une condition
sine qua non pour réussir en
tant qu’entraîneur, avance
Teklak. La loyauté et l’honnê-
teté sont des éléments ma-
jeurs dans le coaching. Un
entraîneur peut avoir les
meilleurs schémas tactiques
en tête et les meilleurs ana-
lystes vidéos à côté de lui, il
ne réussira pas sans une ap-
proche humaine.”
Dans cette même logi-
que, Klopp et Blessin ont
un autre point commun
qui pourrait être anecdoti-
que à première vue mais
qui ne l’est pas : jamais ha-
billés en costume, les deux
Allemands coachent tou-
jours avec la casquette et le
training du club. Comme
pour montrer qu’ils ne
sont pas au-dessus de la
mêlée malgré leur rôle
d’entraîneur. “Mettre un
training et porter une cas-
quette, continue Teklak,
c’est se mettre à la hauteur
du club et montrer qu’on est
un membre à part entière du
collectif. Leur façon de s’ha-
biller trahit inévitablement
quelque chose. Le plus im-
portant est d’être à l’aise
dans son rôle, l’habillement
dépend aussi de la personna-
lité du coach : je vois par
exemple mal Carlo Ancelotti
entraîner avec le training du
Real Madrid… Dans le même
ordre d’idée, Klopp est aussi
souvent sur le terrain pen-
dant l’échauffement pour
montrer qu’il est présent
avec ses joueurs. Pendant
que d’autres restent sage-
ment en costume le long de
la ligne de touche.”
. Un modeste passé
de joueur
Si Klopp et Blessin vont
s’affronter sur la scène
européenne ce jeudi, seul
l’entraîneur de l’Union a
participé à un match euro-
péen en tant que joueur,
avec Stuttgart face à Feye-
noord. Pour le reste, Bles-
sin n’a joué que sept
matchs de Bundesliga et a
réalisé la majeure partie de
sa carrière en D2 alle-
mande. Un énième point
commun avec Jürgen
Klopp qui n’est jamais allé
plus haut que l’anticham-
bre de la Bundesliga avec
Francfort ou Mainz.
Dans les deux cas, l’ab-
sence de passé de joueur
de très haut niveau n’a pas
posé problème pour lancer
leur carrière d’entraîneur.
“Tous les deux clament haut
et fort qu’ils n’ont pas été de
grands joueurs, conclut
Alex Teklak. Mais ils ont été
joueurs et c’est là le plus im-
portant. Ils ont été dans un
vestiaire, ils savent ce qu’est
la pression d’un match, ils
savent ce que c’est de jouer
pour des points et pour de
l’argent. Ils connaissent le
mode de fonctionnement de
ce microcosme si particulier
du football professionnel.
Certains en font parfois une
question de légitimité mais
le fait d’avoir été joueurs,
même si ce n’est pas au plus
haut niveau, leur permet
d’être légitimes dans ce qu’ils
font.”
“Je verserai
peut-être une larme”
Kevin et Alexis Mac Allister seront
adversaires jeudi soir à Anfield.
L
e hasard fait parfois
très bien les choses.
C’est ce que doivent
se dire les frères Mac Al-
lister, Alexis (24 ans) et
Kevin (25 ans), qui se re-
trouveront ce jeudi soir à
Anfield lors de Liverpool-
Union.
La probabilité de ce
duel entre frangins était
d’autant plus faible que
les deux joueurs apparte-
naient encore à un autre
club la saison dernière,
respectivement à Brigh-
ton et à Argentions Ju-
niors. Mais les mouve-
ments du mercato et le
tirage au sort de l’Europa
League ont fait le reste,
Kevin apprenant la
bonne nouvelle depuis
l’avion qui ramenait
l’Union de Suisse après sa
qualification face à Lu-
gano.
“À très bientôt mon
frère”, a-t-il lancé tout
sourire après avoir éclaté
de joie lors de l’annonce
des futurs adversaires
européens.
. Rien n’est
impossible mais…
Jeudi soir, dans l’antre
d’Anfield, un spectateur
observera avec attention
la poignée de mains en-
tre les deux frangins qui
ont été coéquipiers en
Argentine dans le passé :
Carlos Mac Allister, le pa-
triarche qui fera le dépla-
cement pour ce moment
familial historique.
“Il n’était pas possible
pour toute la famille de ve-
nir mais je serai là avec ma
compagne, lance celui qui
a joué dans le passé avec
Diego Maradona en sé-
lection argentine. Nous
étions tous très heureux de
savoir que Kevin et Alexis
allaient se retrouver sur le
terrain même si c’est en
tant que rivaux. Quand la
nouvelle est tombée, le
groupe Whatsapp de la fa-
mille a explosé… Je ne sais
pas si je verserai une larme
lorsqu’ils entreront sur le
terrain ensemble mais c’est
tout à fait possible (sou-
rire).”
Sportivement, la tâche
s’annonce difficile pour
ne pas dire impossible
pour l’Union vu le pres-
tige de son adversaire.
Une équipe qui restait
sur sept victoires d’affi-
lée cette saison avant la
défaite dans les derniers
instants de la partie face
à Tottenham, à neuf con-
tre onze, ce week-end.
“L’Union pratique un
très bon jeu et rien n’est
impossible en football,
analyse Carlos Mac Allis-
ter qui était présent à
Bruxelles lors de la signa-
ture de Kevin à l’Union
cet été. Mais Liverpool a
beaucoup de stars mondia-
les qui sont partout sur le
terrain. Je ne vais pas leur
donner de conseils, c’est le
travail de leur entraîneur
respectif. J’espère surtout
qu’ils apprécieront de pou-
voir jouer l’un contre
l’autre.”