DIDIER SCHYNS
Émilie Graf et Logan Bailly, son compagnon.D.R.
Fille de Helmut Graf et compagne de Logan Bailly, devenu entraîneur des gardiens de l’Union, Émilie Graf a vécu un après-midi cauchemardesque dimanche à Sclessin. Agressée, physiquement et verbalement par des supporters, durant le match Standard-Union, elle témoigne. prevnext
Émilie Graf se souviendra longtemps de sa fin d’après-midi, dimanche, au stade de Sclessin. « C’était humiliant comme jamais », dit-elle tout de go. Ce jour-là, elle arrive en bord de Meuse une heure et demie avant le coup d’envoi du match entre le Standard et l’Union Saint-Gilloise, en compagnie de Prince, le fils de Logan Bailly, son compagnon et depuis le début de saison l’entraîneur des gardiens de l’Union. Direction tribune 1 bloc M1, où les membres des familles du club bruxellois sont censés prendre place. S’y trouve aussi Thomas Meunier, le Diable rouge, venu soutenir ses amis Anthony Moris et Guillaume François.
« Les deux places qui m’avaient été délivrées n’étaient pas situées l’une à côté de l’autre », raconte Émilie. « Ce qui veut dire que Prince, qui est âgé de 12 ans, se retrouvait à quelques mètres de moi. J’ai donc attendu le début du match pour voir s’il était possible d’occuper deux sièges contigus mais libres, ce qui était le cas un peu plus loin. Tous les deux, on s’est retrouvé juste devant deux messieurs, l’un âgé d’une cinquantaine d’années, l’autre sexagénaire, en ne pouvant pas imaginer ce qui allait se passer.. »
Insultes
Comme tout enfant qui se respecte, Prince vit son match à fond, s’érigeant en supporter numéro 1 de son papa. Il exulte et applaudit lorsque Vanzeir ouvre le score en faveur de l’Union. « C’est là que tout a dégénéré », confie Émilie Graf. « Ces deux messieurs, supporters du Standard, ont commencé à hurler sur le gamin, avant que je tente de leur faire comprendre que c’était anormal de parler ainsi à un enfant de 12 ans. Ils m’ont traité de grosse p… Je leur ai dit qu’ils ne savaient pas à qui ils parlaient, en précisant que j’étais la fille de Helmut Graf, qui a porté pendant six ans le maillot du Standard, que j’avais été mariée à Almani Moreira, qui a tout autant marqué l’histoire du club, et que mon fils Diego, aujourd’hui à Benfica, a effectué sa formation à l’Académie, de 5 à 15 ans. Et que mon compagnon n’était autre que Logan Bailly, qui lui aussi est passé par Sclessin. En clair, que le Standard avait baigné toute ma vie et que j’étais supportrice de la première heure de ce club. Rien n’y a fait. »
Le pire était même à venir. « La deuxième mi-temps a été atroce », lâche Émilie. « J’en ai pris pour mon grade ». Avec un point de non-retour lorsque l’Union a fait 1-3. « Un des deux types a tapé sur ma tête avec sa main, tout comme il l’a fait avec Prince, en lui mettant en plus un coup de pied. L’un de ces deux sinistres individus, déchaîné, s’est même vanté qu’il allait me faire voler par la rambarde. Et les insultes n’ont jamais cessé. J’ai à nouveau été traitée à plusieurs reprises de p… Insulter ainsi une maman devant un enfant, c’est une honte ».
Traumatisés
Émilie Graf le dit tout de go, elle n’a pas fermé l’œil de la nuit de dimanche à lundi. « C’était humiliant à mort. Terrifiant aussi. Je suis une femme de 41 ans qui, en général, sait tout affronter et possède un caractère de mec, mais là j’ai senti la haine. J’ai été agressée. J’ai eu très peur, au point de trembler et de ne pas savoir appeler mon frère. Depuis dimanche, je me sens sale. J’ai été humiliée en public, sans que personne ne réagisse. Pire, certaines personnes semblaient se délecter de la situation ».
Pour Prince, le fils de Logan Bailly, les souvenirs de ce funeste après-midi auront également du mal à s’effacer. « Il était au bord des larmes et voulait retourner au plus vite à la maison. Il a été traumatisé par ce qu’il a vu et entendu. Lorsqu’on l’a ramené lundi à Genk, où il évolue comme gardien de but dans un club de la région, il nous a dit qu’il voulait arrêter le football. Vous imaginez… »
Émilie Graf ne compte pas en rester là. Elle souhaite que les coupables soient identifiés. « Des types pareils n’ont pas leur place dans un stade ».