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Son casier vide faisait craindre le pire
Son casier vide faisait craindre le pire

Dimanche, Felice Mazzù retourne dans son Parc Duden.
Voici comment le RSCA est parvenu à l’y arracher.

Qui aurait cru, le 31 mai 2022,

que tout le Lotto Park scan-
derait le nom de Felice

Mazzù presque trois mois
plus tard après une série de tirs au but

inoubliable ? La signature au Parc As-
trid du coach à succès de l’Union a fait

l’effet d’une bombe dans le monde du

football belge. Elle faisait penser à l’ar-
rivée d’Aad De Mos en 1989 après les

exploits du Néerlandais avec le grand
FC Malinois de l’époque.
La venue du Carolo ne faisait pas

plaisir à tous les supporters des Mau-
ves, dont une partie aurait voulu gar-
der Vincent Kompany.

À l’occasion de son retour, ce diman-
che, au Parc Duden, le stade mythique

où il a écrit l’histoire en passant à
deux doigts du premier titre de

l’Union depuis 1935, nous avons re-
tracé la saga Mazzù. Quelle a été la tac-
tique d’Anderlecht pour arracher le

coach de l’année auprès de son voisin
avec qui – malgré les quatre défaites
de suite – les relations semblaient être
bonnes ? Reconstitution du feuilleton.
. Sous le charme de Mazzù
depuis novembre
Retour au mois de novembre 2021.
Après le 1 sur 9 d’Anderlecht, le trône
de Kompany vacille une première fois.
La direction est déjà charmée par le
formidable parcours de Mazzù à

l’Union (33 sur 48), mais Kompany

sauve sa peau à Charleroi (1-3) et An-
derlecht ne contacte aucun succes-
seur éventuel. Après la dramatique fi-
nale de la Coupe contre Gand, les dou-
tes refont surface. Ils sont renforcés

par la double défaite contre l’Union
en playoffs. Surtout le 0-2 du 15 mai au

Parc Astrid qui scelle le sort de Kom-
pany, qui n’est d’ailleurs plus sur la

même longueur d’onde avec la direc-
tion. Lors du dernier match, à Bruges

(2-2), on sent le divorce inévitable.
Trois jours après ce match à Bruges,

Vandenhaute annonce la fin de la col-
laboration avec Kompany.

“C’est un moment riche en émotions

après deux saisons très intenses. On dé-
plore son départ.”

Pendant ce temps-là, au Parc Duden,
tout semble aller pour le mieux dans
le meilleur des mondes entre Felice
Mazzù et la direction de l’Union après
la deuxième place historique. Sauf
que cette impression ne correspond
pas à la réalité. Mazzù est déçu par la

façon dont le club a géré sa prolonga-
tion de contrat.

. Il rompt avec Bayat, l’agent
d’Ancelotti entre dans la danse
Retour en arrière. Janvier 2022.
Mazzù estime que – vu son titre en D1B
et la première place au classement en
D1A après une campagne surréaliste –
le moment est venu de parler d’un

nouveau bail. Il se sépare de son an-
cien manager Mogi Bayat, qui était

peu en contact avec lui, et se lie au bu-
reau international CAA Base de l’agent

Frank Trimboli, qui gère aussi les affai-
res de Carlo Ancelotti (Real Madrid) et

Frank Lampard (Everton).
La mise à l’écart de Mogi n’amuse

pas l’Union, qui entretient d’excellen-
tes relations avec Bayat, un agent qui

pense aussi aux intérêts des clubs.
Est-ce que Mazzù voudrait un salaire
hors-norme en désignant Trimboli
comme son représentant ? Ou est-ce

qu’il songerait à un départ ? Le prési-
dent Alex Muzio et le CEO Philippe

Bormans ne bougent pas. Même
quand Mazzù leur lance des appels du
pied en conférence de presse.
Le raisonnement des dirigeants
saint-gillois est le suivant : tant que
l’Union est en course pour le titre, on
ne négocie avec personne. Ni avec les
joueurs, ni avec leur entraîneur. Et il y
a un autre élément qui joue. Mazzù
avait négocié une énorme prime de
champion dans son contrat. Se disant
qu’un titre était utopique, la direction
avait accepté cette clause. Mais si elle
devait vraiment lui payer cette
somme, elle devrait en tenir compte

lors des négociations pour son nou-
veau contrat.

Mazzù, lui, poursuit son travail avec
le même enthousiasme, en se disant
que tout rentrerait dans l’ordre. Un
départ n’est pas à l’ordre du jour. La
meilleure preuve : après le 3-1 contre
Anderlecht lors du premier match des
playoffs, il lance à ses joueurs, devant
la caméra de la série Allez l’Union : “Si

vous jouez comme ça, avec cette menta-
lité et cette expérience, je ne veux plus

coacher une autre équipe.”

Mais dans les semaines qui suivent,
rien ne bouge. La direction reste fidèle

à ses principes : elle attend le lende-
main du dernier match de champion-
nat – la défaite 0-1 contre l’Antwerp du

22 mai, match après lequel Mazzù
aurait vidé son casier – pour lui faire
une première proposition. Mazzù est

déçu. Muzio, Bormans et même le pro-
priétaire Bloom parlent surtout de

l’avenir sportif du club et l’offre finan-
cière qui lui est faite, est largement in-
férieure à ses attentes. Mazzù n’évo-
que à aucun moment un intérêt d’An-
derlecht. La direction est confiante.

Elle fait comprendre à son coach
qu’elle fera un effort financier via des
bonus.
. Bormans appelle Vandenhaute
Anderlecht, qui a suivi le dossier

Mazzù de près lors des dernières se-
maines, a vent des négociations diffi-
ciles au Parc Duden. Via des intermé-
diaires, le club apprend que le T1 est

ouvert à des offres d’autres clubs. Le
Sporting passe à l’action. Mais il n’est

pas le seul intéressé : deux clubs ita-
liens se manifestent auprès de ses

agents. Mais Mazzù ne veut pas quitter
la Belgique. Il ne veut pas abandonner

son papa Pasquale (89 ans), qui est
seul depuis le décès de son épouse
Anna en septembre.
Le 25 mai, jour de la mise à l’écart de
Kompany, le nom de Mazzù comme

candidat numéro 1 à Anderlecht cir-
cule sur les réseaux sociaux et la ru-
meur nous est confirmée. Mazzù est le

seul nom qui figure sur la liste des
Mauves.
Le principal intéressé fait savoir à
l’Union qu’il a reçu une proposition

d’un autre club, mais il ne cite tou-
jours pas Anderlecht. “On a compris

qu’il s’agit du Sporting, disait Bormans
dans nos colonnes, le 27 mai. Nous lui
avons pourtant fait une très belle offre. À
lui de se décider. Bien sûr qu’on espère
qu’il reste, mais peut-être sommes-nous
naïfs.” Bormans prend son téléphone
et contacte directement Vandenhaute
pour savoir si les bruits sont corrects.
Puis, les choses vont vite. Le 27 mai,
une photo circule sur Twitter de

Mazzù à table avec Wouter Vanden-
haute, le CEO Peter Verbeke, le direc-
teur recrutement Dries Belaen et le

scout Christophe Lonnoy. Les cinq ne
se sont pas cachés pour négocier : ils
l’ont fait au restaurant Ogst à Hasselt.
Était-ce un coup monté de faire cela en
public ? L’Union est dégoûtée. Les

Saint-Gillois prétendent que les con-
tacts avec Anderlecht datent de plus

longtemps, ce que le Sporting a tou-
jours formellement démenti. Et main-
tenant, l’Union comprend pourquoi

Mazzù avait vidé son casier après le
match contre l’Antwerp.

Quelques jours plus tard, la crainte
des joueurs de l’Union devient réalité.

Avec un message dans le groupe What-

sApp des joueurs, Mazzù leur annonce

son départ à Anderlecht, tout en les re-
merciant chaleureusement pour la

collaboration pendant les deux sai-
sons précédentes. Plusieurs joueurs

clés, comme Morris et Nielsen, rece-
vront encore un message personnel.

Le groupe est évidemment déçu,
mais pas surpris. Ils avaient suivi la

saga via les médias et les réseaux so-
ciaux. Et la plupart comprennent que

Mazzù ait dit oui à ce nouveau défi. Le

salaire que Mazzù va toucher à Ander-
lecht est largement supérieur à ce que

l’Union lui proposait. Il aurait même
plus que doublé. Mais c’est surtout le
challenge sportif dans le club le plus
prestigieux du pays qui le tente.
. Retour avec
la conscience tranquille

Le 31 mai à 17 h 30, Anderlecht officia-
lise l’arrivée de Mazzù. “J’ai une énorme

envie de relever un nouveau défi, dit
Mazzù dans le communiqué officiel.
L’ambition du Sporting Anderlecht est

une opportunité unique que je ne pou-
vais pas laisser passer. Je suis honoré de

porter l’emblème de ce club. Je veux ap-
porter mon expérience et ma passion

pour aider le plus grand club de Belgique
à retrouver la place qui est la sienne.”

Vandenhaute, de son côté, déclare :
“Nous sommes convaincus que Felice
Mazzù nous aidera à gagner à nouveau

des prix. C’est un professionnel et un ex-
cellent people manager. Et, comme nous,

il a l’ambition de faire à nouveau du RSC

Anderlecht le club numéro un en Belgi-
que.”

À l’Union, on se sent lésé. Le vice-
champion demande un dédommage-
ment de 500 000 euros, Anderlecht ne

veut pas aller au-delà des
250 000 euros. L’Union va au tribunal.

Louis Derwa, l’avocat de Mazzù, ras-
sure son client qu’il est droit dans ses

bottes. Mais détestant les conflits, le

Carolo part en vacances avec un senti-
ment amer. Il devra attendre le 11 août,

jour où l’Union et Anderlecht ont

trouvé un compromis, avant de dor-
mir sur ses deux oreilles. La somme

dépasse les 250 000 euros mais est
loin des 500 000 euros initialement
réclamés.

Dimanche, 98 jours après avoir coa-
ché son dernier match au Parc Duden,

Felice Mazzù pourra s’y rendre avec la

conscience tranquille. Mais en refou-
lant la pelouse et en rentrant dans les

catacombes du vieux stade mythique,
il va sans doute refaire le film dans sa
tête des deux magnifiques années
qu’il a vécues à l’Union.

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