Sur le banc contre Anderlecht, l’Unioniste
reste un titulaire important de Mazzù.
La frustration a dû être
grande dans le chef
de Loïc Lapoussin, di-
manche. Laissé au re-
pos lors de la dernière jour-
née de la phase classique car
menacé de suspension, le
Malgache a dû laisser sa place
de titulaire à Kaoru Mitoma
contre Anderlecht, avant de
monter au jeu pour le dernier
quart d’heure.
Et d’amener un plus à son
équipe avec deux dribbles
réussis sur trois, quatre duels
gagnés sur sept et trois bal-
lons récupérés. “J’ai expliqué
durant la trêve qu’une nouvelle
compétition commençait avec
ces playoffs et que j’alignerais
les joueurs qui sont les plus en
forme”, a expliqué son entraî-
neur, Felice Mazzù, après la
rencontre.
Un coach qui, même s’il ne
l’a pas aligné lors des deux
dernières rencontres, a fait de
Loïc Lapoussin une des pièces
maîtresses de son système de-
puis le début de la saison. Ce-
lui qui a une valeur mar-
chande proche des trois mil-
lions d’euros sur
Transfermarkt a été titularisé
29 fois cette saison. Rempla-
çant à trois reprises, il n’a été
absent que lors de deux
matchs, l’un pour blessure et
l’autre pour éviter la carte
jaune de trop.
Souvent aligné sur le côté
gauche, Lapoussin a aussi pris
place derrière les attaquants
ou même comme second atta-
quant, en l’absence de Dante
Vanzeir. Avec une constance,
peu importe la place où il évo-
lue : le grand nombre de kilo-
mètres parcourus lors d’une
rencontre.
. Comme un moteur
de voiture
En janvier, en déplacement
au Club Bruges (0-0), le
joueur de 26 ans avait en-
glouti le plus de kilomètres
des 22 acteurs. Même chose
quelques jours avant, lors de
la réception de Genk (2-1) avec
pas moins de 12,5 kilomètres
parcourus en 90 minutes.
“Loïc a de grosses datas au ni-
veau de la distance parcourue
mais sa particularité est la dis-
tance qu’il parcourt à très haute
intensité, analyse Thibaut
Meyer, le préparateur physi-
que de l’Union. Dans le foot-
ball moderne, la vitesse de dé-
placement, la vitesse du ballon
ou encore les duels un contre un
en accélération pure font la dif-
férence. Loïc a cette capacité à
être bon dans ces actions inten-
ses. Il peut courir des distances
à haute intensité à une vitesse
entre 20 et 25 km/h de manière
assez naturelle. De par son pro-
fil physique, chaque fois qu’il
court, il est très rapide.”
En plus de cette qualité, le
Malgache a une VMA (vitesse
maximale aérobie mesurant
la capacité physique d’endu-
rance d’un joueur) très éle-
vée.
“À l’Union, il fait partie du top
cinq des joueurs avec la
meilleure VMA, avance Thibaut
Meyer. Ce sont ses qualités phy-
siques naturelles qui lui permet-
tent d’être au-dessus de la
moyenne. Avoir une grosse VMA
lui permet d’être comme un
poisson dans l’eau dans son
rôle de piston qui l’oblige à ré-
péter les actions offensives et
défensives. Ce n’est clairement
pas un marathonien mais il a
cette capacité de récupérer très
vite. C’est comme un moteur de
voiture : il peut accélérer et dé-
célérer rapidement.”
. Nonchalant, vraiment ?
De quoi tordre le coup à
certaines légendes comme
celle qui raconte que Loïc La-
poussin est un joueur non-
chalant.
“C’est vrai qu’il peut donner
cette impression de noncha-
lance sur un terrain, continue
le préparateur physique fran-
çais. Il marche parfois car il doit
récupérer de ses efforts. Mais
quand il se met en mouvement,
il le fait de manière très intense.
Il alterne entre la marche et l’ac-
célération très rapide.”
C’est aussi l’avis de Régis
Brouard, son coach durant
son passage au Red Star du-
rant la saison 2017-2018, qui a
pu se rendre compte des qua-
lités physiques du joueur.
“Son attitude nonchalante
n’était qu’une impression vi-
suelle, explique l’actuel entraî-
neur de Bastia, en Ligue 2. Du-
rant les tests physiques, il faisait
toujours partie des meilleurs.
C’est un joueur qui a besoin de
remplir sa caisse en répétant
des matchs, ce qu’il a pu faire
durant la phase classique en
D1A avec l’Union.”
Si Brouard appréciait forte-
ment le profil de Lapoussin,
ce n’était pas le cas de tout le
monde au Red Star.
“J’ai eu une grande dispute
avec le club à son sujet, se rap-
pelle le Français de 55 ans. On
disait que c’était mon fils au
Red Star (sourire). J’ai toujours
beaucoup cru en lui mais ce
n’était pas le cas de tout le
monde. Certains ne voyaient
pas ses qualités alors qu’il avait
un gros volume de jeu et de
grandes qualités balle au pied.
Il a l’avantage de pouvoir jouer
dans un couloir devant une dé-
fense à trois ou plus haut sur le
terrain devant une défense à
quatre. Je suis certain que des
clubs français ou étrangers ont
bien vu ses performances cette
saison à l’Union. En tout cas, si
j’avais pu le récupérer, je
l’aurais récupéré…”
. Un joueur attachant
Au Red Star, Grégoire Lefeb-
vre a côtoyé Lapoussin durant
deux saisons. Il garde le sou-
venir d’un garçon attachant…
parfois pas assez exigeant.
“Loïc, c’était le gars bourré de
talent mais qui n’était pas tou-
jours le plus discipliné, se sou-
vient l’actuel joueur de Nancy.
Il n’était pas toujours à 100 %
aux entraînements mais quand
il se mettait à jouer, il savait
tout faire : il attaquait, il défen-
dait, il était très technique et su-
per endurant. Quand il est mis
dans la difficulté, il parvient à
hausser son niveau de jeu.”
Durant l’été 2019, le Malga-
che quitte la région pari-
sienne et atterrit à Virton.
Quelques mois plus tard,
Christian Bracconi devient
l’entraîneur d’une équipe qui
va faire face à de gros problè-
mes administratifs tout en
réussissant quelques exploits
sportifs en Division 1B.
“À Virton, je n’avais pas de
joueur à part comme lui, com-
mente le coach français. Il m’a
plu tout de suite car j’ai trouvé
quelqu’un un peu en marge qui
sait apporter de la profondeur,
de la vitesse, de la percussion.
C’est un garçon qui a une flui-
dité technique intéressante. On
a par contre dû travailler son
repli défensif mais il a la
chance d’avoir un gros volume
de jeu. Il n’était peut-être pas
assez décisif (NdlR : 5 buts et
4 assists en 26 matchs avec
Virton) mais il parvient à met-
tre la panique chez l’adver-
saire et provoquer des coups
francs, des penaltys ou des cor-
ners.”
En dehors des terrains,
Bracconi se souvient d’un
personnage très attachant
qui l’a marqué.
“C’est un garçon sensible qui
a besoin d’affection et d’un
rapport franc. Il faut lui mon-
trer qu’on l’aime et ne pas faire
de chichis avec lui. À Virton, il
n’a jamais posé le moindre
problème même s’il fallait par-
fois le recadrer. Dans la foulée,
il s’excusait puis se mettait au
diapason. Je me souviens
qu’on se prenait souvent dans
les bras, c’était le moyen de se
transmettre nos émotions.”
Une manière de faire très
humaine qui se rapproche
de la philosophie de Felice
Mazzù qui a su parfaitement
comprendre son joueur et
exploiter tout son potentiel.
Lapoussin le sait : il peut
être l’un des facteurs X de
l’Union dans la course au ti-
tre. Avant de peut-être passer
un palier dans sa carrière
qui est désormais parfaite-
ment lancée…
“Il n’aura jamais l’étiquette
‘problème’ au-dessus de lui”
Son entourage a toujours cru
que Lapoussin allait faire
une belle carrière.
L oïc ? Quand on le voyait jouer au quartier, on
savait tous qu’il allait faire une carrière pro-
fessionnelle dans le football.”
Ces mots sont ceux de Brian, ami d’enfance
de Lapoussin. Un ami qui fait presque chaque
week-end le déplacement en Belgique depuis
Paris pour assister aux rencontres du Malga-
che.
“Je trouve qu’il réalise une grosse saison,
avance Brian. Il est motivé mais surtout concen-
tré. Il arrive à rester focus peu importe ce qu’il se
passe autour de lui. Je m’attendais à de telles per-
formances de sa part vu le niveau de jeu qu’il affi-
chait ces dernières années. Cela ne fait que confir-
mer ce que moi et d’autres proches pensions de
lui.”
Pour celui qui est aussi footballeur, à Auber-
villiers en CFA2, les critiques sur le fait qu’il ne
soit pas assez décisif ne sont pas justes.
“On discute souvent de cela à deux, avoue-t-il. Il
n’est peut-être pas assez décisif quand on regarde
ses statistiques mais il est souvent présent dans
les actions offensives de son équipe. S’il n’est pas
dans la dernière passe, il est souvent dans l’avant-
dernière passe. Et je lui dis aussi qu’il a les quali-
tés pour tirer les coups de pied arrêtés, cela lui per-
mettrait d’augmenter ses statistiques (sourire).
Après les matchs, je n’hésite pas à appuyer sur les
éléments négatifs de sa prestation. Nous sommes
très exigeants entre nous et on se dit la vérité
même quand c’est déplaisant. Mais quand il a fait
un gros match, il n’y a rien à dire…”
Comme sur le terrain, Lapoussin est une per-
sonne assez posée en dehors de la pelouse.
“Il va être toujours souriant, blagueur et très
tranquille. Vous pouvez être certain qu’il n’aura ja-
mais l’étiquette ‘problème’ collée sur son front. Il
ne se mêle pas de cela, il fait sa vie. En dehors du
foot, il aime jouer à la Playstation, faire des res-
taurants, aller au karting ou encore regarder des
matchs de Ligue 1. Quand il était petit, il suppor-
tait Marseille. Vu ses qualités, il pourrait jouer à
l’OM. Maintenant, il aime de plus en plus le PSG
(rires). La Ligue des champions ? Personnelle-
ment, j’ai toujours voulu être pro mais je n’ai pas
réussi. S’il joue cette compétition, je serai heureux
pour lui comme si c’était moi qui la jouais.”