Sébastien Pocognoli a trouvé son bonheur du côté du Parc Duden.BelgaLe titre de l’Union, sa fichue blessure au tendon, sa rééducation et sa vie en jaune et bleu : Sébastien Pocognoli veut encore évoluer au plus haut niveau. Interview… next
C’est dans les catacombes du stade Joseph Marien, à Forest, que le rendez-vous est fixé. Dans ces lieux qui ont gardé le visage et l’aspect authentique qu’ils avaient il y a près d’une centaine d’années, Sébastien Pocognoli se sent comme un poisson dans l’eau. Depuis son arrivée à l’Union Saint-Gilloise, en janvier 2019, l’ancien capitaine du Standard n’a pourtant pas été épargné par la poisse, s’occasionnant un début de rupture du ligament du genou gauche qui lui aura imposé, au prix de rechutes dont il aurait volontiers fait l’économie, un long calvaire. Ce qui ne l’a pas empêché de fêter, en l’espace de quelques jours, deux événements majeurs : le titre décroché par le club bruxellois, auquel il aura contribué à sa façon, en jouant un rôle important dans l’ombre, et son grand retour aux affaires, près de treize mois après avoir disputé son dernier match.Sébastien Pocognoli, vous n’avez pas disputé cette saison le moindre match officiel avec l’Union. Le titre du club bruxellois, c’est aussi le vôtre ?Cela dépend de la manière dont on voit les choses. Sur le terrain non parce que je n’y ai pas participé activement et physiquement et qu’il n’y a pas eu de ma part d’apport sportif, mais je pense avoir été important pendant toute la saison pour la dynamique de groupe, pour le rôle que j’ai pu jouer en coulisses. Dans l’effectif, je suis le seul gars avec de l’expérience, de loin le plus âgé, avec du vécu à l’étranger, même si je reste très humble par rapport à cela. Mais par expérience, je sais que c’est quand chacun apporte sa pierre à l’édifice qu’on arrive à quelque chose.Ce titre, il n’a pas manqué d’un peu de saveur ?J’ai la chance d’avoir décroché d’autres trophées collectifs dans ma carrière, à AZ, au Standard, à Brighton. Celui-ci, je l’ai vécu à travers les yeux des plus jeunes joueurs du noyau. Je voyais que c’était leur premier titre, la première fois qu’ils allaient pouvoir se produire en division 1 et je suis allé puiser mon plaisir là-dedans, ainsi que dans la joie des supporters qui attendaient ce moment-là depuis tellement longtemps.Les choses auraient pu être tellement différentes sans cette déchirure au niveau du tendon du genou gauche survenue fin février 2020…Le tendon du genou a lâché et cela a été très compliqué. Huit mois de calvaire avec des rechutes, une blessure assez rare où il n’y avait pas de protocole clair. Le club a été extraordinaire avec moi tant dans la gestion physique qu’humaine, en continuant à me rendre important pour le groupe. Ils ont tous été fantastiques et c’est à eux que je dois le fait d’avoir rejoué mon premier match après plus d’un an mardi dernier à Louvain, deux mois après avoir repris les entraînements collectifs.Vous est-il arrivé, durant cette traversée de désert, de vous poser des questions quant à la suite des opérations ?C’est clair. Je me suis investi à 1000 % dans ma rééducation, effectuée tous les jours à Genk dans un centre, mais quand on ne sent pas que la force revient dans le muscle au bout de sept ou huit mois, on se pose forcément des questions. À l’arrivée, je me suis convaincu d’essayer encore une fois de revenir sur le terrain malgré deux rechutes.Avez-vous songé à arrêter les frais, à vous dire qu’il était temps, à 33 ans, de tourner la page ?Par apport à mon investissement et à tout ce que le club m’a donné pour m’aider à revenir à niveau, je ne pouvais pas laisser tomber. Je devais aller au bout du bout pour remercier tous les gens qui m’entourent de leur confiance. Grâce à cela, j’ai pu participer aux entraînements collectifs à l’approche du titre, ce qui est toujours un moment délicat pour des jeunes parce qu’il faut pouvoir gérer la pression. J’étais avec eux aux matches, dans le vestiaire, j’ai été là tout près d’eux pendant les deux derniers mois. C’est ce que le club voulait aussi.La montée programmée de l’Union, cela vous a, on l’imagine, donné plus encore l’envie de mordre sur votre chique pour revenir ?C’est sûr que cela a joué sur la dynamique. Quand tu te retrouves sur un tapis, dans une salle aux côtés de gens qui ne sont pas des sportifs, qu’on est en plein Coronavirus, que tu ne vois plus tes équipiers parce que chacun vit sa vie et qu’il n’y a plus de supporters, c’est dur et encore plus à mon âge, quand on n’a plus ses plus belles années devant soi. Zinho Vanheusden, lui, peut le faire plus facilement. Moi, ma seule motivation, ça a été de revenir sur le terrain, d’être en forme, en me disant que j’aimerais encore bien rejouer en D1. C’est de la pure passion.De la fierté aussi, par rapport à ceux qui pensaient que c’était un gros pas en arrière…Peut-être certains l’ont-ils pensé. Moi, je savais ce qui allait se passer. Souvenez-vous de mes propos lors de ma conférence de presse de présentation : j’avais dit qu’il y avait ici un beau projet et que l’Union allait vite remonter. Les joueurs et le staff ont accompli un travail extraordinaire. Pour moi, c’était plus facile de revenir de blessure dans ce contexte-là. Si on avait joué la relégation, la dynamique de rééducation aurait été différente. Tout a été parfait.Votre contrat à l’Union s’achève en juin, mais il reste une option d’un an que le club peut lever. Quel va être votre avenir ?On va discuter. Le club est content de moi parce que j’apporte mon expérience au groupe et qu’il n’y a pas de profil comme le mien dans ce noyau. On va voir comment, me concernant, les prochaines semaines vont se passer et si je suis moi-même satisfait de mes performances.Et votre ambition à vous ?Ma priorité, c’est l’Union. J’aime ce club avec qui j’ai une relation spéciale et l’inverse est vrai aussi, je pense. Une relation qui me plaît beaucoup et que je n’avais pas eue lors de mes derniers mois au Standard. Quand j’ai quitté Liège, signer à l’Union était pour beaucoup un choix un peu étonnant, mais je croyais au projet. Je ne suis pas venu ici pour taper dans le ballon et prendre un peu de plaisir comme ça vite fait en passant, j’avais vraiment envie de participer à l’ascension de l’Union en division 1. Physiquement, cela n’a pas fonctionné comme je le voulais, mais il y a quelque chose d’unique qui s’est créé. Maintenant, au sortir d’une année sans avoir disputé le moindre match, c’est difficile pour moi d’affirmer que je vais pouvoir faire ceci et cela. Je dois me retester.Via Tony Bloom, l’Union est pilotée par Brighton, où vous avez joué : c’est parce que vous aviez de bons contacts avec votre ancien club que vous avez atterri à la Butte ?Le football, ce sont les mémoires, les souvenirs. Je pense en avoir laissé de bons à Brighton, ce qui m’a permis de vivre deux montées avec le même propriétaire et avec deux clubs différents, ce qui doit être assez unique : avec Brighton en Premier League en 2017, après 34 ans d’attente, et l’Union cette saison en division 1A, après 48 années de disette. Quand je suis venu parler avec l’Union, juste avant mon départ du Standard en janvier 2019, j’ai senti qu’on allait refaire le même coup qu’à Brighton. Je ne me suis pas trompé. Mon sentiment était exactement le même, même si j’avais décidé, dans la foulée du titre en Championship, de revenir au Standard alors que j’aurais pu continuer à Brighton. La façon dont une aventure se termine dans un club, sur le plan humain, c’est toujours important. Pas sur le court terme mais sur le long terme.Comment est votre relation avec Felice Mazzù ?Très bonne. C’était une belle rencontre. J’ai appris beaucoup à son contact. En étant de générations différentes, on a à peu près les mêmes valeurs, les mêmes origines et la même éducation. Il est honnête dans ce qu’il fait, par rapport à l’équipe, dans sa communication, il est tactiquement très bon et possède un vécu inestimable pour une équipe comme l’Union. Quand il a signé, je lui ai dit qu’on venait tous les deux avec la même optique. Souvent, on s’accroche désespérément à des clubs de D1 sans projet, alors que parfois c’est mieux de redescendre pendant un an, même si ce n’est pas facile de jouer face au Club NXT. Mais sur le long terme c’est payant. Reculer pour mieux sauter, c’est bien alors qu’on a tendance à choisir la facilité.Une reconversion à l’Union, comme cela avait été envisagé au Standard avant que l’histoire ne se termine en eau de boudin, c’est possible ?Je veux me focaliser sur les derniers matches de championnat, en espérant en disputer l’un ou l’autre. C’est donc encore un peu tôt pour en parler. Cela dit, le milieu du foot est celui que je connais le mieux. On verra.Et à l’avenir, quel est le métier du football susceptible de mieux vous convenir ?Pour le moment, en qualité d’ancien international, je passe ma licence de coach à l’Union belge. Dans la vie, on commence parfois quelque chose sans savoir si on va vraiment aimer. Jusqu’ici, cela se passe bien et j’aime bien. Peut-être vais-je creuser de ce côté-là même si, à l’heure actuelle, ma seule envie est de rejouer.