Président de l’Union Saint-Gilloise depuis 2015, Jürgen Baatzsch est le grand artisan du retour au premier plan du club bruxellois.
Malgré l’un des plus petits budgets de la D1B, l’Union est encore en course pour accrocher le top 4 synonyme de Playoffs 2 et ses matchs contre des formations de D1A. « On va tout faire pour y parvenir », affirme l’enthousiaste président allemand du club bruxellois dont le rêve ultime est de ramener son club parmi l’élite du foot belge. Mais, en construisant
un projet solide et sans folie des grandeurs.
Jürgen Baatzsch, l’Union joue un match clé face à Tubize ce dimanche (1). Avec la possibilité d’intégrer le top 4 alors qu’il ne reste qu’une journée de phase classique en D1B. Décomptez-vous les heures ?
Oui ! On est super-motivés à l’idée de gagner ce match. Les joueurs sont euphoriques à l’idée d’atteindre le top 4. J’ai vu Tubize contre Roulers et je dois dire respect. De notre côté, on est relax car notre objectif initial était le maintien. L’équipe brûle de gagner, mais, si on n’y arrive pas et qu’on atteint par le top 4, ce ne sera pas une catastrophe nationale non plus.
Vous devez l’emporter pour avoir votre destin en main lors de la dernière journée. Pourtant, le bilan est peu reluisant face à Tubize avec cinq matchs sans victoire contre les Brabançons. Votre club est-il touché par une malédiction ?
Il n’y a pas vraiment de malédiction dans le sport. On pourrait le croire, mais ce n’est pas le cas. Tubize a de bons attaquants et est très bon sur phases arrêtées. Mais, défensivement, c’est prenable. Ce sera leur bonne attaque contre notre bonne défense. Quand on avait été là-bas, on avait très bien joué mais l’arbitre avait pris une mauvaise décision. Cela arrive. A part le dernier match où on a perdu 3-0, on a toujours été dans le coup face à eux. Vous savez, en début de saison, plus personne ne croyait en l’Union après six matchs et, maintenant, on reste sur six matchs sans défaite. C’est pourtant la même équipe. Le coach et le staff font un excellent travail. Pour dimanche, on n’a pas peur, on est confiant et il y aura beaucoup de supporters au stade.
Une rencontre qui se déroulera au Heysel, « votre » stade cette saison en raison des travaux au stade Marien. Ce déménagement forcé vous a-t-il porté préjudice ?
Je l’ai souvent dit : je suis heureux de jouer dans le stade national parce que c’était la seule solution notre stade n’étant pas aux normes. On n’avait pas le choix même si nos supporters ne sont pas très contents car ils sont très attachés au stade Marien. Clairement, on sera plus fort chez nous. Le Heysel est surdimensionné pour nous avec 2 ou 3.000 personnes dans le stade.
Un retour à la maison qui se fait attendre…
Il y a eu des retards car il a fallu changer d’architecte. On a perdu quatre ou cinq mois. Il y avait des problèmes avec l’opposition pour voter le budget à la commune de Saint-Gilles. Mais, je suis très heureux du soutien de la commune et de la Ville de Bruxelles. Les travaux vont bientôt commencer, mais je pense que les autorités politiques veulent être sûres que l’Union reste dans le football professionnel.
A vous entendre,
on n’a pas l’impression que les supporters unionistes reverront leurs protégés à Saint-Gilles au début de la saison 2017-18. Est-ce encore une possibilité ?
C’est exclu. Les travaux commenceront au printemps car il y a de nombreux permis à obtenir et cela prend du temps en Belgique. Il suffit de demander à l’échevin des Sports de la Ville de Bruxelles au sujet du stade national. Au début, il était question de tribunes modulables, mais le stade à Saint-Gilles est un monument historique. Ce sera donc en dur. En principe, il y aura 10.000 places dont 5.000 assises. On pourrait passer à 14.000 dans le futur, mais ce n’est pas encore nécessaire. Entre-temps, on a pu négocier avec la Ville de Bruxelles pour une extension du bail. On jouera donc une deuxième saison au Heysel. Il serait possible de déménager en cours de saison si on reçoit le feu vert, mais des équipes pourraient contester ce changement. Cela pourrait créer des conflits. On
fera donc une saison complète au Heysel.
L’exercice 2016-17 n’a pas été uniquement à cause de votre installation au Heysel. Vous avez également essuyé les plâtres d’un championnat à huit équipes. Quels sont les points positifs de cette refonte ?
Le niveau de la D1B est excellent. Les matchs sont toujours très serrés. Chaque équipe joue pour gagner. J’ai entendu de nombreuses personnes dire que le niveau était supérieur à certaines rencontres de D1A. En D1B, on ne peut pas se contenter de faire un match nul alors que, parfois, en D1A, on s’endort devant la télé ou dans le stade. Chez nous, c’est le spectacle. La réforme est excellente, mais tout n’est pas rose. On bloque trop les montées et les descentes. Or, c’est naturel. Dans la vie, il y a des naissances et des décès. Tout doit se renouveler. J’ai l’impression que l’intérêt financier prime trop souvent sur l’intérêt sportif. C’est dommage.
Selon vous, faudrait-il revoir la formule concernant le football professionnel en Belgique ?
La D1B à huit équipes, c’est trop peu. Je suis favorable à une série avec douze formations. On a demandé à tous les clubs de D1B et ils sont pour une série avec douze équipes en D1A et douze en D1B. Mais, la vision des clubs de D1A n’est pas la même. Des équipes comme Saint-Trond ou Westerlo n’ont aucun intérêt à voir une série à douze clubs. On pourrait également imaginer une D1A à 16 et une D1B à 12, mais les dirigeants ne voudront pas partager les droits TV. Je trouve qu’il y a trop du protectionnisme dans le football belge. Pourquoi on n’accepterait pas des clubs comme le Beerschot, Dendre ou le FC Liège en D1B ? Ce serait une bonne chose sportivement parlant. Le sport, ce n’est pas que la question financière, mais aussi la compétitivité.
Autre cheval de bataille des équipes de D1B : les recettes liées aux droits télé. Faut-il revoir les montants ?
Les droits télé vont augmenter pour les clubs de D1B la saison prochaine. C’est une obligation. Ce n’est pas viable avec 500.000 euros. Il y a des clubs qui perdent de l’argent chaque saison. C’est tenable une saison, mais pas plusieurs. Je pense qu’ils vont doubler les droits ou au moins dégager 800.000 euros pour chaque club.
Ce serait un fameux coup de pouce pour l’Union et son principal investisseur : vous. Jürgen Baatzsch à la tête de l’Union Saint-Gilloise, ce n’était pas écrit d’avance. Comment êtes-vous arrivé là ?
Je vis en Belgique depuis 1983. Une connaissance d’une banque belge me racontait toujours les histoires de l’Union. Un jour, il m’a proposé d’aller voir un match et je me suis dit : quelle catastrophe ! C’était un match pour éviter la descente en Promotion. Par la suite, j’ai commencé à être mécène et, ensuite, on m’a demandé d’être administrateur. J’ai vite compris qu’il fallait injecter de l’argent et ramener
le club chez les professionnels. Je m’y emploie.
Avec comme toile de fond, un retour de l’Union parmi l’élite….
Absolument, c’est mon objectif ! Mais, il ne faut pas précipiter les choses en achetant des joueurs avec des salaires trop importants et constater, lorsque vous êtes en D1A, qu’ils ne sont pas assez forts. Dans ce cas, vous élargissez votre dette et vous risquez des problèmes financiers. Il y a alors deux possibilités : la faillite ou une vente du club à des investisseurs qui imposent leur loi. Il n’en est pas question à l’Union.
Comme dans de nombreux autres domaines, l’argent est le nerf de la guerre. Et vous avez une bonne nouvelle pour les supporters puisqu’il y a eu récemment une augmentation du capital.
En effet. On vient d’obtenir une augmentation de capital de deux millions d’euros d’une société belge qui investit dans le sport. Elle a
repris 20 % des parts. Avec ce montant, on est tranquille pour la saison prochaine. Si on joue en Playoffs 2 contre le Standard ou Genk, cela fera également des recettes supplémentaires. La saison prochaine sera aussi bonne sportivement avec l’Antwerp, le Cercle avec des joueurs de Monaco, le Beerschot qui devrait monter et peut-être Mouscron.
A plus long terme, on voudrait que le club devienne autonome. Dans cette optique, Il y aura d’autres investisseurs. J’en vois deux la semaine prochaine qui veulent voir le club en D1. Le président de Courtrai m’a dit qu’il fallait un budget de dix millions en D1A. On n’y est pas encore.
Une injection d’argent qui n’a pas été facile à obtenir. Comment expliquez-vous que cela soit si difficile ?
En Belgique, il y a un manque d’intérêt pour le sport. J’épaule le service sponsoring de l’Union, mais
c’est très compliqué. On a le soutien de la commune et de la Ville de Bruxelles. Mais, dans le secteur privé, c’est difficile. L’arrivée d’investisseurs étrangers est presque inéluctable. Quel regard portez-vous sur ce phénomène récemment constaté à Tubize, Roulers et Louvain ? Si vous avez une maison à vendre et qu’aucun Belge n’en veut, il faut la vendre à un étranger. Tant que l’argent arrive sur le compte et qu’il est propre, il n’y a pas de problème pour moi. En parlant des investisseurs étrangers, il ne faut pas être raciste . A Roulers, cela se passe très bien avec les Chinois. Un investisseur n’est pas un autre. L’Union a été abusée par des investisseurs italiens dont le seul intérêt était de faire venir des joueurs extra-communautaires. On a mis fin à la collaboration. GUILLAUME RAEDTS (1) Union-Tubize sur La Deux dimanche dès 15 h 45.
GUILLAUME RAEDTS ■